Palais de l'Elysée - lundi 17 novembre 2003
Le Président de la République a réuni autour de lui, lundi 17 novembre 2003, le Premier ministre M. Jean-Pierre Raffarin, M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur, M. Dominique Perben, garde des Sceaux, M. Luc Ferry, ministre de l'Education nationale et de M. Xavier Darcos, ministre délégué à l'enseignement scolaire.
Il a ensuite reçu une délégation de responsables de la communauté juive de France. La délégation était composée du directeur du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) M. Haïm Musicant, du vice-président du CRIF, M. Joseph Zrihen, de M. le grand rabbin Joseph Sitruk, accompagné de son collaborateur M. le rabbin Haïm Korsia, du président et du premier vice-président du Consistoire central, MM. Jean Kahn et Dov Zerah, et du président du Fonds social juif unifié, M. David de Rothschild.
Palais de l'Elysée, le 17 novembre 2003
Question : Avez-vous un message particulier à adresser à la Nation et également à la communauté juive qui est inquiète pour son avenir en France ? Et d'autre part, je voudrais savoir si, vu le contexte actuel, vous estimez qu'il est judicieux pour votre ministre de l'intérieur de débattre jeudi avec Tariq Ramadan sur France 2 ?
Le Président : Je voudrais dire que je condamne solennellement au nom de la Nation tout acte d'antisémitisme, tout acte qui n'est pas conforme aux exigences naturelles de la République. A travers les actes d'antisémitisme, c'est en effet chaque citoyen qui est atteint dans ses droits fondamentaux, le droit au respect de ses croyances, le droit au respect de ses convictions. Quand on s'attaque, en France, à un juif, il faut bien comprendre que c'est à la France tout entière que l'on s'attaque.
A l'occasion du conseil restreint que j'ai réuni cet après-midi, j'ai demandé la plus grande vigilance dans la prévention, la plus grande fermeté dans la poursuite, la plus grande sévérité et la plus grande rapidité dans la sanction des actes antisémites.
Le Gouvernement va demander à tous les Préfets de réunir les responsables de la communauté juive pour arrêter, sur le terrain, avec les services de sécurité, les dispositions à prendre afin de renforcer la protection notamment des lieux de culte et des établissements scolaires.
Dans le même temps, le Garde des Sceaux demandera aux procureurs d'identifier et de signaler toutes les procédures dans lesquelles sont en cause des actes d'antisémitisme afin de requérir des sanctions exemplaires contre leurs auteurs. Je dis bien des sanctions exemplaires.
Enfin, j'ai demandé au ministre de l'Education Nationale de renforcer l'apprentissage de la citoyenneté dans nos écoles afin d'éduquer chaque enfant au respect de l'autre, au dialogue et à la tolérance.
Depuis des siècles et des siècles, nos compatriotes juifs sont en France chez eux comme chacun de nos compatriotes. L'antisémitisme est contraire à toutes les valeurs de la
France. Et je compte sur la vigilance de chacun pour s'y opposer.
CREATION D’UN COMITE INTERMINISTERIEL DE LUTTE CONTRE LE RACISME ET L’ANTISEMITISME
Le Président de la République a présidé, ce lundi 17 novembre, un Conseil restreint pour arrêter les mesures destinées à renforcer la lutte contre l’antisémitisme.
En raison de l’augmentation des actions à caractère antisémite, constatée au cours de la période antérieure, le Gouvernement avait pris de nombreuses dispositions depuis mai 2002 en liaison avec les représentants de la communauté juive de France.
C’est ainsi qu’a été adoptée en février 2003 la proposition de loi « Lellouche » qui permet d’incriminer plus fortement les actes à caractère raciste
et antisémite.
Plusieurs événements récents ont conduit le Premier Ministre à proposer au cours de ce Conseil la création d’un Comité Interministériel de Lutte contre le racisme et
l’Antisémitisme qui se réunira chaque mois sous sa Présidence.
1/ Des instructions précises vont être adressées par le Ministre de l’Intérieur aux Préfets pour renforcer la sécurité des lieux de culte et des établissements d’enseignement.
Elles viseront notamment à resserrer les relations entre les responsables de l’ordre public et les représentants de la Communauté juive.
De même, les communes seront sensibilisées à la mise en place de dispositifs de surveillance sur la voie publique à proximité de ces établissements.
2/ Le garde des Sceaux prescrira aux Parquets de veiller à ce que le jugement des infractions intervienne dans des délais beaucoup plus brefs qu’aujourd’hui, et à ce qu’il soit recouru, à chaque fois que cela sera possible, à la procédure de comparution immédiate.
Par ailleurs, auprès de chaque Procureur Général, un Magistrat référent sera désigné pour assurer les relations avec la Communauté juive, le suivi des procédures
pénales et le renforcement de l’information sur les condamnations prononcées afin de souligner l’exemplarité des sanctions.
Les responsables des lieux de culte et des établissements d’enseignement recevront dans les prochains jours une information sur leurs droits en cas d’agression ou de
déprédations.
3/ Le Ministre de l’Education Nationale adressera aux Recteurs d’Académie des directives visant à prévenir les actes de violence, menaces et propos racistes ou antisémites
dans les établissements d’enseignement, et à sensibiliser les élèves au respect des valeurs fondamentales de la République.
Un correspondant sera désigné dans chaque Rectorat pour traiter les agissements de cette nature et pour assurer les relations avec les représentants de la Communauté juive.
L’Inspection Générale de l’Education Nationale portera une attention particulière au contenu des manuels scolaires.
Le Ministre réunira prochainement les Editeurs pour les sensibiliser à cette question.