Palais de l'Elysée, le jeudi 1 mars 2001
LE PRÉSIDENT - Je voudrais d'abord dire toute ma joie, toute celle de la France, de recevoir aujourd'hui le Président TRAJKOVSKI en voyage officiel. Les liens que la France a avec la République de Macédoine sont forts, anciens, cordiaux et nous ne demandons qu'à les développer. À l'occasion du passage du Président TRAJKOVSKI, j'ai tenu, au nom de la France, à saluer chaleureusement l'évolution démocratique et pacifique de la République de Macédoine depuis son indépendance. L'ensemble de la communauté internationale rend hommage au modèle de tolérance et de cohabitation multiethnique que représente la République de Macédoine dans une région par ailleurs troublée et difficile.
Cette confiance de la communauté internationale à la République de Macédoine et à ses autorités s'est traduite par le fait que la Macédoine a été le premier pays de toute la région à conclure un accord de stabilisation et d'association avec l'Union européenne. Et cet accord a naturellement ouvert la voie de l'intégration dans l'Union européenne, si elle le désire, à la République de Macédoine. Et la France, naturellement, apporte son plein soutien au rapprochement entre la République de Macédoine et l'Union européenne. La France apporte aussi son plein soutien à l'affirmation d'une République de Macédoine démocratique, stable, dans des frontières respectées. J'ai dit tout cela naturellement au Président TRAJKOVSKI et je tenais à le dire publiquement à l'occasion de son passage à Paris avant de lui donner la parole.
M. TRAJKOVSKI - J'ai profité de l'occasion de cette rencontre avec M. CHIRAC pour transmettre nos messages après le sommet des pays de sud-est européen qui s'est tenu à Skopje, parce que j'estime que la France a un rôle à jouer et qu'elle a un droit moral d'être particulièrement présente dans cette région de l'Europe. Alors, bien sûr, je lui ai parlé de nos entretiens à Skopje et du désir de ces pays de marcher vers l'Europe, vers l'Union européenne.
J'ai souligné surtout que c'était un Sommet de chefs d'État et de gouvernement qui ont absolument les mêmes idées, qui partagent les mêmes orientations dans la démocratisation de leur pays et la stabilité de la région. Notre résolution, notre détermination à lutter contre tous ceux qui cherchent à détruire ce que nous avons construit déjà dans cette région est forte. Nous avons l'intention de créer, de construire des frontières non pas ethniques mais des frontières ouvertes, et le désir de résoudre les problèmes par le dialogue. Et je lui ai parlé bien entendu de notre développement économique.
Nous avons évoqué bien entendu la situation au Kosovo et nous sommes tout à fait d'accord pour penser que ce n'est pas le statut, la question du statut, du Kosovo qui est la plus importante mais plutôt l'instauration d'une véritable démocratie au Kosovo.
Nous avons évoqué également la situation en Serbie du sud, qui nous inquiète beaucoup. Et enfin nous avons parlé également des incidents qui se sont produits à la frontière entre la Macédoine et le Kosovo, nous avons partagé notre inquiétude. Et je remercie M. CHIRAC de nous soutenir pour résoudre tous ces problèmes. Et, en même temps, de s'unir contre tous ceux qui veulent résoudre des problèmes par la violence, ce qui va bien sûr contre nos intérêts : nos intérêts sont de créer une région stable et pacifique. Et notamment je voudrais souligner surtout qu'il ne faut pas détruire les relations interethniques de cohabitation que nous avons créées depuis des siècles dans cette région.
Je remercie M. CHIRAC de nous soutenir afin que notre chemin soit un petit peu plus court vers l'intégration à l'Union européenne, pas seulement pour la Macédoine mais également pour les autres pays. J'apprécie particulièrement son approche qui est très claire dans ce domaine pour indiquer ce chemin vers l'Union européenne. Et nous apprécions particulièrement la proposition française du système CARDS et également cette idée française visant permettre à tous les pays du sud-est de l'Europe de signer un accord d'association et de stabilisation. Donc je remercie M. CHIRAC.
QUESTION - Je voudrais entendre un commentaire de la part du Président CHIRAC en ce qui concerne la situation actuelle sur la frontière entre le Kosovo et la Macédoine : est-ce que vous avez parlé de mesures concrètes pour prévenir cette situation avec le Président TRAJKOVSKI ?
LE PRÉSIDENT - Tout d'abord, je suis inquiet de cette situation. Ensuite la France condamne, sans réserve, ces actes qui relèvent du terrorisme et nous ne pouvons pas les accepter. Troisièmement, naturellement, nous avons évoqué ce problème avec le Président. Vous comprendrez que je ne développe pas publiquement ce que nous avons dit à ce sujet.
QUESTION - Est-ce que vous avez parlé de la question du nom de la Macédoine et des problèmes qu'elle a avec ses voisins, les Grecs ?
LE PRÉSIDENT - Vous savez, il y a longtemps que je milite pour que ces problèmes soient réglés conformément aux intérêts légitimes de la Macédoine. J'ai commencé trois semaines après mon élection, il y a six ans, au Conseil européen de Cannes. Depuis les choses ont évolué, je n'ai pas changé d'avis et je soutiens toujours les légitimes revendications de la Macédoine.
QUESTION - Monsieur le Président CHIRAC, vous connaissez l'inquiétude et l'insatisfaction du côté macédonien concernant le rôle joué par la KFOR. Que dit la France à cet égard ?
LE PRÉSIDENT - Je sais. Mais c'est un problème complexe, d'abord parce que dans la région concernée il s'agit des forces américaines. Alors, je le répète, nous sommes favorables à ce qu'un maximum de mesures soient prises pour maîtriser et éradiquer toute forme de terrorisme dans cette région. Nous en avons longuement parlé avec le Président. Ce n'est naturellement pas un problème facile mais je puis vous assurer que la France fera ce qu'elle pourra pour appuyer l'action des autorités macédoniennes.
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez discuté aujourd'hui avec le Président CHIRAC. Êtes-vous satisfait de ce que la France a offert pour lutter contre ce qui se passe et mettre en phase ce qu'il faut sur notre frontière du nord ?
M. TRAJKOVSKI - Le Président CHIRAC a dit qu'il donnerait son entier soutien aux autorités macédoniennes pour lutter contre la présence de ces groupes terroristes et extrémistes. Son appui vise à maintenir, à préserver ce qui déjà a été construit il y a très longtemps en Macédoine, ce modèle de cohabitation interethnique. Ensemble nous nous opposons à toute idée de créer des régions ethniquement pures. Bien sûr, le soutien est surtout dirigé vers l'utilisation de tout moyen appelé diplomatique mais en fin de compte nos mesures sont justifiées par la défense et la protection de notre souveraineté et de notre intégrité territoriale. Merci.
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