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Palais de l'Élysée, Paris, le 25 janvier 2007
LE PRESIDENT - Mesdames, Messieurs, je voudrais tout d'abord remercier chaleureusement chacune et chacun d'entre vous d'être venu participer à cette réunion sur le Liban afin d'informer vos différents journaux, radios, télévisions.
Je vais d'abord faire un compte-rendu et vous présenter le contexte et les objectifs de cette conférence. Les amis du Liban se sont rassemblés aujourd'hui, à haut niveau, pour
marquer leur attachement à un Liban uni et souverain, soutenir son gouvernement issu lui-même d'élections démocratiques, et apporter leur appui au programme de modernisation
économique et social que ce gouvernement a présenté. Chacun connaît la situation politique actuelle du Liban, meurtri par les évènements dramatiques de cet été, et encore
récemment par des assassinats politiques qui appellent les plus fermes des condamnations et des punitions. Dès la fin des combats, la conférence de Stockholm avait permis de
répondre aux principales urgences. Mais le travail qui reste à faire est à la mesure des destructions immenses faites au Liban.
Un vaste élan de solidarité de toute la communauté internationale était absolument nécessaire. C'est pourquoi la France, en accord avec le gouvernement libanais et avec l'appui
décisif de l'Arabie saoudite, a pris l'initiative de cette conférence, afin de traduire cet élan en engagements concrets. Quatre ans après la conférence de Paris II, en novembre
2002, dont Rafic HARIRI fut l'architecte génial, cette réunion avait également pour but de fédérer les volontés des amis du Liban en appui au programme économique et social de
réformes élaboré par le gouvernement libanais. Ce programme complet, solide, courageux s'inscrit dans une perspective à moyen terme de cinq ans, bien au-delà de la
nouvelle législature. Il fera entrer durablement, et résolument, le Liban dans la voie du progrès économique et de la justice sociale. Ce programme repose sur des engagements des
Libanais à moderniser leur pays. Mais sa mise en œuvre suppose le concours actif de toutes les forces politiques du Liban quelles qu'elles soient. Sa mise en oeuvre suppose
également une aide internationale.
Alors, quels sont les résultats ? Comme vous avez pu le constater, l'appel de la France a été entendu. Le niveau de représentation et la diversité des délégations venues du monde
entier, États et grandes institutions internationales et régionales, au premier rang desquelles le Secrétaire général des Nations unies, Monsieur BAN Ki-Moon, montrent éloquemment
la force du soutien au Liban, ainsi que la solidarité qui s'exprime avec l'ensemble de sa population. Bien entendu, ce succès n'aurait pas été possible sans l'effort méritoire des
Libanais eux-mêmes. L'appréciation très favorable des institutions financières internationales, et la perspective de conclusion d'un programme post-conflit avec le Fonds Monétaire
International, ont constitué un élément décisif pour que l'aide rassemblée, soit une aide conséquente. Nous avons veillé, car c'est indispensable, à ce que cette
modernisation, comme l'aide internationale qui l'accompagne, bénéficient à l'ensemble de la population libanaise sans exception, afin de maintenir son unité, tout en
respectant les différentes composantes.
Ainsi, la générosité des amis du Liban a-t-elle permis de réunir 7 milliards 600 millions de dollars, sous forme d'engagements financiers ou d'aides associés à des projets
sectoriels ou sociaux. Les détails sont en cours de finalisation par le Secrétariat de la Conférence et vous seront communiqués. Le soutien des pays arabes amis du Liban, en
particulier ceux de la péninsule arabique et du Golfe, celui d'autres donateurs comme les Etats-Unis, donateurs essentiels, permettront dès 2007 d'accompagner la mise en place des
premières réformes économiques et sociales, puis d'inscrire le développement libanais dans le moyen terme. C'est donc un résultat très positif sur les plans à la fois
politique et financier.
La souveraineté du Liban suppose la consolidation financière, la reconstruction et la modernisation. Toute les composantes et les forces politiques du pays doivent être associées
à ces réformes et à leur mise en œuvre. Tous les acteurs responsables dans la région en particulier doivent agir dans ce sens. C'est leur responsabilité
vis-à-vis de l'ensemble des Libanais. La résolution 1701, qui a permis la cessation des hostilités, offre le cadre approprié au règlement des problèmes. Sa mise en œuvre
intégrale est la condition du retour à la stabilité au Liban, dont celle de toute la région finalement dépend. Voilà les principales observations que je voulais faire.
Je vais maintenant donner la parole à Monsieur SINIORA, puis au Secrétaire général, Monsieur BAN Ki-Moon, à Madame RICE, à Monsieur BARROSO et à Son
Altesse le Prince Saoud al-Fayçal Bin Abdulaziz AL SAOUD.
M. Fouad SINIORA - Merci infiniment. Je vous remercie de cette conférence si réussie qui n'aurait pas été possible du tout, et qui n'aurait pas
marché, si vous n'aviez pas été là avec toute votre équipe, et si vous n'aviez pas travaillé d'une manière absolument extraordinaire. C'est grâce à votre
dévouement et grâce à la façon dont vous avez œuvré pour le Liban uni, et pour défendre ce que signifie le Liban. J'aimerais vous dire ici que cette conférence a été une
manifestation de soutien et une expression de foi et de confiance dans le Liban et dans la population libanaise. Une expression de foi en notre vision d'un Etat stable, prospère et
démocratique. Vision qui est partagée par les amis du Liban dans la région, et partagée également par tous nos amis dans le monde entier.
Au cours de la conférence, j'ai entendu un grand nombre de déclarations de soutien en faveur de notre programme de réformes économiques. C'est une chose qui avait été envisagée
par les Libanais, non pas uniquement sur une période de deux mois, mais qui est une chose qui a été élaborée sur une longue période. Nous y avons consacré beaucoup de
discussions. Mais la situation au Liban ne nous a jamais vraiment permis de mettre en œuvre ce programme de réformes. Ce programme de réformes a été au cœur de notre exercice
d'aujourd'hui. Il est évident que nos objectifs ne se seraient jamais réalisés si nous n'avions pas un programme de réformes, et si nous ne pouvions pas bénéficier de l'aide
internationale. Ce qui s'est passé aujourd'hui, c'est un véritable partenariat entre nos amis, étant donné les valeurs communes que nous partageons avec nos frères, et également
avec nos amis du monde entier. Nous considérons que c'est un partenariat en raison du soutien de la communauté internationale en faveur du Liban à moyen terme, donc pour aider
les programmes de réformes économiques à moyen terme. Ce programme, ce n'est pas quelque chose de ponctuel, et cette conférence n'est pas non plus un événement ponctuel,
pour soutenir un gouvernement donné ou pour résoudre une crise financière donnée, pas du tout. Cette conférence est là pour soutenir tous les Libanais, et non pas uniquement
un groupe, pas un gouvernement précis. Non, c'est une conférence pour tous les Libanais et pour le Liban tout entier.
Nous avons entendu énormément d'idées. Je dois dire que cela s'est exprimé sous forme de contributions de la part d'un grand nombre de pays bailleurs de fonds, et d'institutions qui
nous ont déjà, sous des formes différentes, fait connaître leur participation financière, et ceci selon un horizon temporel différent. Certains nous ont dit qu'ils
pourraient nous aider sur toute la période de cinq ans. Beaucoup nous ont dit qu'ils nous soutiendraient dans un avenir immédiat, et avec un soutien, pour les années ultérieures,
qui viendrait au moment opportun, conformément au processus institutionnel.
Je rentrerai ravi, ravi du niveau de soutien financier qui nous a été annoncé aujourd'hui. Comme vous l'a dit le Président CHIRAC, nous avons déjà demandé son aide au FMI
et à l'AIPCA, c'est-à-dire l'Aide d'urgence post-conflits du FMI. Nous avons déjà demandé leur aide et nous avons entendu beaucoup de soutien de la part de toutes
les institutions financières. Nous allons demander à toutes les institutions financières arabes, et là je vous parle du Fonds monétaire arabe, je vous parle du Fonds
koweïtien, du Fonds saoudien, je vous parle également du Fonds d'Abou Dabi. Nous allons leur demander de former un groupe consultatif pour nous aider, aider le Liban. Cela viendra
s'ajouter à toute l'aide que nous obtenons des autres organisations internationales et des institutions financières internationales, pour que, tous ensemble, nous puissions
travailler de manière transparente, pour pouvoir gérer ces fonds de la meilleure manière possible et également pour que tous ensemble nous puissions passer à la mise en
œuvre de notre programme.
Comme je vous l'ai dit, je rentre absolument ravi, ravi de ces résultats. Je tiens à remercier tous ceux qui ont participé aujourd'hui à la réussite de ce programme.
Merci infiniment de tout le travail qui a été fait par le Président CHIRAC et ses collaborateurs, et merci infiniment à toute mon équipe au Liban, qui a tellement travaillé
pour que ce programme devienne une réalité. Avant de terminer, je vais également dire quelques mots en arabe.
Je voudrais m'adresser à présent à mes frères, citoyens libanais, à tous les manifestants qui sont sortis aujourd'hui pour exprimer leur opinion, d'une façon ou
d'une autre. J'en appelle à tous les Libanais, je les appelle à s'éloigner de toute tension, de toute escalade, et à être sages comme par le passé. Car tout ce
qui se passe au Liban aujourd'hui ne sert que les intérêts de notre ennemi. Je regrette profondément les victimes qui sont tombées aujourd'hui et les blessés d'aujourd'hui. Je
voudrais leur dire "Je suis avec vous par le cœur, tous les Libanais sont avec vous et tous ceux qui aiment le Liban sympathisent avec vous aujourd'hui". Nous sommes aujourd'hui
réunis pour le Liban, et dans l'intérêt du Liban et de tous les Libanais. Il faut leur donner le bon exemple au Liban. Personne ne peut aider un pays si ce pays et si le peuple de ce
pays ne peut pas s'aider lui-même. Il nous faut donner le meilleur exemple au monde entier, pour montrer que les Libanais veulent construire une nation et ne veulent pas que leur pays
soit un champ de conflits ouverts. Nous voulons leur dire que nous voulons vivre ensemble, que nous avons des droits, mais nous avons aussi des obligations. Qu'il nous faut coopérer
pour construire ce pays, pour que l'Etat dans ce pays soit la seule instance qui prenne les décisions, pour que l'état soit un Etat tolérant, un Etat qui s'occupe d'assurer
l'intérêt de tout ses fils. Il nous faut travailler pour ça de façon déterminée et avec beaucoup d'amour. J'en appelle donc à votre sagesse et à la raison. Je suis
sûr que les Libanais vont comprendre et sauront tous où se situe l'intérêt du Liban.
Je vous remercie.
LE PRESIDENT – Merci, Monsieur le Premier ministre. Je donne la parole à Monsieur le Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies,
M.BAN Ki-Moon.
M. BAN Ki-Moon - Merci beaucoup Monsieur le Président. Mesdames et Messieurs, je suis très heureux et content des résultats de cette conférence
aujourd'hui. Saisissant cette occasion, je voudrais exprimer, au nom des Nations unies, ma gratitude à Son Excellence Monsieur le Président Jacques CHIRAC et à son
gouvernement, d'avoir convoqué cette conférence vitale pour le futur du Liban. Les promesses très généreuses faites par un grand nombre de partenaires du Liban parmi la communauté
internationale sont essentielles pour le développement et la reconstruction du pays. Mais ceci, en soi, ne suffit pas pour que la reconstruction économique soit efficace et pour que
le développement se fasse. Il faudra qu'il se fasse sur une base de stabilité et de dialogue entre toutes les parties au Liban.
Enfin, j'aimerais exprimer ma gratitude, mon admiration et mon respect pour M. SINIORA, pour son leadership au cours d'une période particulièrement difficile pour revenir sur la voie
de la stabilité et de la démocratie.
Et maintenant, en tant que Secrétaire général des Nations unies, je voudrais appeler très sincèrement, et je prie instamment toutes les populations du Liban de ne pas avoir recours
à la violence, de choisir toujours la voie d'un dialogue sincère entre les populations, entre les groupes et ceci pour l'avenir d'un Liban démocratique. En tant que Secrétaire
général des Nations unies, et les Nations unies en tant qu'organisation ont été, et continueront à être au côté du peuple libanais, pour vous accompagner dans vos efforts
si nobles.
Mme Condolezza RICE - Merci, Monsieur le Président, merci infiniment d'avoir organisé cette conférence. Merci de votre dévouement extraordinaire,
non pas uniquement pour cette conférence, mais vraiment depuis toujours, pour votre dévouement de toujours en faveur du Liban et de la démocratie au Liban. Je tiens à
remercier le gouvernement français, ainsi que le peuple français d'avoir organisé cette conférence. C'est un honneur pour moi de partager, avec vous, Monsieur le Premier ministre
SINIORA, cette tribune. Vous avez été un leader d'une grande force pour votre peuple en cette période si difficile, quelqu'un qui a toujours fait preuve d'intégrité, de dignité.
Et cela dans les circonstances les plus difficiles. Vous nous avez montré ce qu'il y a de mieux pour le Liban, vous nous avez expliqué ce qu'il y a de meilleur dans le peuple
libanais. Je dois dire que la Communauté internationale apprécie vivement votre leadership.
La conférence d'aujourd'hui a été, à mon avis, une expression très importante de l'intention de la Communauté internationale de soutenir le Liban, de soutenir le peuple
libanais en cette période difficile. Les Etats-Unis, pour leur part, ont promis 770 millions de dollars, ce qui fera pour l'année pratiquement un milliard de dollars, étant donné
l'aide à la reconstruction qui a déjà été accordée par les Etats-Unis. Nous avons également organisé une initiative du secteur privé. Le Premier ministre SINIORA et
moi-même nous sommes réunis ce matin avec les dirigeants de l'industrie américaine, y compris le chef de Inter City Bank, M. CAFFARI qui, lui-même, est d'origine libanaise et John
CHAMBERS, qui organisaient cet effort conjoint du public et du privé. Les efforts du gouvernement des Etats-Unis vont, nous l'espérons, permettre au peuple libanais de se rendre
compte qu'il y a un avenir, un avenir plein d'espoir, où il y aura une plus grande prospérité économique, de meilleurs emplois, de meilleures possibilités de faire des
études.
Monsieur le Premier ministre nous savons que vous allez vraiment effectuer toutes les réformes que vous avez décidé d'entreprendre, qui permettront à tous ces bienfaits
économiques de venir bénéficier à la population. Mais, outre tout cela, tout ce que ces crédits pourront faire en matière d'infrastructures, de réformes sécuritaires, de
soutiens économiques, plus que tout cela, eh bien nous espérons que le peuple du Liban se rendra compte que c'est là l'expression de la part du peuple américain, d'une
expression d'admiration, notre admiration, de notre amitié pour le Liban, et aussi le fait que nous croyons en la possibilité pour le peuple libanais de surmonter des périodes très
difficiles. L'avenir du Liban est important, certes, pour le peuple libanais. C'est la raison pour laquelle nous allons travailler avec la communauté internationale pour veiller
à ce que la résolution 1701 soit pleinement mise en œuvre et que le respect de la souveraineté, la liberté, la fin de l'intimidation par la violence, que tout cela soit
vraiment possible pour le peuple libanais. Mais l'avenir du Liban est important, pas uniquement pour le peuple libanais, il l'est également pour l'avenir d'une région en difficulté,
parce que, Monsieur le Premier ministre, nous savons que le peuple libanais veut un Liban pacifique, unifié, qui respecte toute la diversité culturelle et religieuse du Liban. Un
Liban qui puisse montrer que des peuples différents considèrent que cette différence n'est pas un permis de tuer, mais bien au contraire un permis de vivre ensemble dans la paix,
dans l'honneur et dans la prospérité. Voilà le message qui est important, pas uniquement pour le Liban, mais pour toute la région. Et nous sommes à côté de vous,
vraiment, dans cet effort. Je vous remercie.
M. José Manuel BARROSO - Merci, Monsieur le Président. Tout d'abord je tiens à remercier le Président CHIRAC et la France, pour l'initiative
de cette conférence de soutien au Liban. Monsieur le Premier ministre SINIORA, la communauté internationale a montré aujourd'hui le soutien à votre pays, à son unité,
à son droit d'exister comme Etat, comme Etat démocratique, à la volonté de son peuple de vivre en paix et en stabilité. En fait, comme l'a annoncé le Président
CHIRAC, cette conférence a permis de réunir un total d'environ 7 milliards 600 millions de dollars. La Commission européenne, à elle seule, a annoncé une contribution qui
s'élève à 500 millions d'euros. Si nous considérons le total de l'Union européenne, c'est-à-dire ce que la Commission européenne a annoncé, plus la Banque
Européenne d'Investissement, plus les Etats membres, c'est environ 2 milliards et 400 millions d'euros, soit 2 milliards et 900 millions de dollars, c'est-à-dire environ 40 % de
l'effort pour le Liban. C'est la preuve concrète de la solidarité de l'Europe pour le Liban. Nous sommes à vos côtés. L'Europe et la communauté internationale, comme l'a dit
si bien le Secrétaire général des Nations unies, sont à côté du peuple du Liban. Mais comme vous l'avez dit aussi, Monsieur le Premier ministre du Liban, c'est en premier
lieu aux Libanais eux-mêmes de montrer leur volonté de réconciliation, d'établir un consensus national, d'affirmer la consolidation de leur Etat. Nous espérons aussi que les autres
Etats dans la région pourront respecter l'intégrité du Liban. C'est notre vœu. C'est notre message de solidarité.
Le Prince Saoud Al-Fayçal - Merci Monsieur le Président de me permettre de m'exprimer au cours de cette conférence de presse. Je vous remercie tout
particulièrement pour le très grand honneur que vous me faites en me permettant d'avoir le dernier mot. C'est un privilège que je n'ai pas souvent !
Je ne vais pas ajouter grand-chose à ce qui a déjà été dit ici. Naturellement, il s'agit de vous remercier, Monsieur le Président, ainsi que Mme Condoleezza RICE l'a
dit, vous remercier non pour l'organisation de cette réunion, mais pour votre intérêt vis-à-vis du Liban, qui ne s'est jamais démenti au cours de votre vie, et de l'aide que
vous avez constamment apportée au Liban pour surmonter les crises qui ont toujours été au-delà de sa capacité et qui n'ont jamais été de son fait. Je crois que la
conférence a atteint son objectif. Les amis du Liban, encore une fois, ont fait preuve de leur solidarité en dépit de toutes les expériences du passé. Mais maintenant, il
appartient aux Libanais de prouver qu'ils peuvent travailler avec la communauté internationale pour faire revenir au Liban ce qui a été perdu pendant l'épreuve de l'été dernier.
Nous sommes convaincus que si nous avons le soutien du peuple libanais, parce que comme on l'a dit, comme le Premier ministre l'a dit, c'est une aide qui est à apporter à
tous les Libanais, à ce moment-là, le Liban pourra redevenir ce qu'il était, et les Libanais pourront vivre dans la paix et la sécurité. Ce qui est important au Liban,
c'est ce qui fait le Liban. On parle de confrontation, de confrontation religieuse, de confrontation ethnique, de choc des civilisations. Le Liban représente tout cela. Si le Liban
peut vivre en paix avec lui-même, il peut, à ce moment là, sans aucun doute, montrer et prouver les possibilités de réussite de tout cela à toute la région et
à la communauté internationale.
Encore une fois, merci Monsieur le Président pour tout ce que vous avez fait. Merci Monsieur le Premier ministre.
LE PRESIDENT - Je voudrais simplement ajouter à ce qu'à dit son Altesse, ma très grande reconnaissance pour l'action personnelle de Sa
Majesté, le Roi d'Arabie saoudite, grâce à qui les choses ont pu se décider telles quelles se sont décidées.
QUESTION - Merci Monsieur le Président pour votre conférence si réussie. Ma question s'adresse à Madame Condoleezza RICE et au Prince
Al-Fayçal. Madame RICE, Altesse, le Président CHIRAC, ce matin, a appelé Israël à se retirer des fermes de Chebaa. Nous comprenons qu'on vous a demandé de faire pression sur
les Israéliens pour qu'ils se retirent de Chebaa, pour enlever cet argument, cette arme aux Hezbollah. Alors où en sont vos efforts, et pensez- vous que ceci pourra se faire sous peu
?
Altesse, nous comprenons qu'il y a des efforts entre l'Arabie Saoudite et l'Iran et qu'un haut fonctionnaire iranien a visité le Liban pour essayer de ramener le calme au Liban. Est-ce que c'est vrai et quelle est l'initiative prise par l'Arabie Saoudite pour essayer d'arriver à une solution au Liban ?
Mme Condolezza RICE - La question des fermes de Chebaa a été évoquée dans la résolution 1701 et c'est quelque chose qui devra être traité, faire
l'objet d'un rapport du Secrétaire Général des Nations Unies. Il y a eu une transition d'un Secrétaire Général à un autre, mais je sais que le Secrétaire Général BAN Ki-
Moon, est parfaitement conscient des responsabilités des Nations unies pour étudier cette question. Naturellement, cela implique des décisions antérieures des Nations et donc les
Nations unies sont l'instance appropriée pour un accord. Nous nous félicitons de voir, dès que possible, un rapport sur ces questions afin de voir quelles seront les résolutions qui
seront nécessaires et possibles.
Le Prince Saoud Al-Fayçal - Il n'y a pas vraiment d'initiative, qu'on puisse appeler une initiative saoudienne. Il y a un message qui a été reçu par
le Roi d'Arabie saoudite auquel il a été répondu. Le message visait à coopérer pour ramener la solidarité entre Musulmans. Le message, en réponse, a été que si c'est
là l'intention, les actions se font entendre bien plus facilement que les mots. Si l'Iran peut faire quelque chose pour affirmer son soutien à la région, à ce
moment-là, ce sera une œuvre en faveur de la solidarité du peuple musulman. Effectivement, depuis que le message est passé, les choses se sont calmées. Donc, il faut croire
qu'il a eu une certaine influence.
QUESTION - Monsieur le Président, en tant qu'initiateur, et avec votre engagement pour la tenue et la réussite de cette conférence, pensez-vous que
les tristes événements d'aujourd'hui, à Beyrouth, vont affecter, ou du moins ternir, cette ambiance plutôt optimiste qui a régné aujourd'hui à la réunion de Paris,
ou, au contraire, provoquer un effet inverse ?
LE PRESIDENT - Je suis parfaitement informé des événements auxquels M. SINORIA a fait allusion tout à l'heure, en les regrettant à
juste titre. Car la violence n'est jamais une réponse intelligente à un problème, quel qu'il soit. Mais j'ai observé qu'un certain nombre d'appels au calme émanant de
plusieurs autorités importantes, différentes autorités importantes au Liban, ont été émis en début d'après-midi. J'espère ardemment qu'ils seront entendus.
QUESTION - Madame RICE, ce matin vous avez dit que la promesse d'aide des américains était pour tout le peuple libanais et c'est également quelque
chose qui a été dit par M. SINIORA. Donc c'est quelque chose qui concerne le gouvernement et même celui qui serait dirigé par le Hezbollah ?
Mme Condolezza RICE - Tout d'abord, le programme d'aide contient des éléments qui visent à soutenir différents éléments de réformes
économiques. Je crois que c'est quelque chose qui doit être compris. Je crois que c'est quelque chose qui concerne bon nombre de promesses de dons des bailleurs de fonds ici.
Nous traitons avec le gouvernement dûment élu du Liban et le Premier ministre SINORA. Je ne veux pas évoquer des hypothèses sur l'avenir du Liban parce que moi, je me concentre,
maintenant, comme tous les participants à cette conférence, sur l'espoir que le gouvernement démocratiquement élu pourra assurer la sécurité, la paix et la réconciliation
entre sa population. C'est cela l'objectif de ce programme. C'est effectivement quelque chose pour tout le peuple libanais. Comme vous savez, le Hezbollah est considéré, classé, par
les Etats-Unis, comme une organisation terroriste. Je dois dire que c'est quelque chose qui n'a pas changé. Mais notre objectif, ici, et notre but, ici, le point sur lequel nous
concentrons ici, c'est ce gouvernement démocratiquement élu qui a entrepris des réformes économiques qui, si elles sont menées à bien, seront sans précèdent pour le Liban
et pour la région. Nous allons soutenir cela et nous allons le soutenir vigoureusement.
QUESTION - Vous engagez 770 millions de dollars pour le Liban: Pour ce faire, faut-il avoir l'approbation du Congrès américain ? Vous aurez peut-être
quelques difficultés à convaincre les Démocrates à voter en faveur de cela ? Dans quelle mesure appliquez-vous la même stratégie étrangère, la même politique
étrangère ? L'utilisation de l'argent, de la force militaire peuvent-elles apporter au Moyen-Orient la paix et la démocratie ?
Mme Condolezza RICE - Tout d'abord, moi, je pense que la seule chose qui va permettre d'apporter au Moyen-Orient la paix et la démocratie, ce sont les
peuples du Moyen-Orient. C'est un choix qu'ils doivent faire. Or, au cours de ces nombreuses dernières décennies, il s'est passé la chose suivante : il n'y a pas eu suffisamment de
voix internationales en soutien de ceux qui souhaitent faire ce choix. Les États-Unis essaient, actuellement, de créer, essaient de renforcer les voix de ceux qui souhaitent choisir
la démocratie. Je vais vous dire que moi, je pense qu'il ne faut pas imposer la démocratie. C'est la tyrannie qu'on impose. Si vous demandez aux gens "est-ce que vous souhaitez avoir
votre mot à dire dans le choix des gens qui vont vous diriger-ce qui a été le cas lorsque les Libanais ont élu ce gouvernement - eh bien les gens vous diront "oui", oui
absolument, où qu'ils soient, sur des routes poussiéreuses en Afghanistan ou pour ceux qui vivent une situation très difficile en Irak. Où qu'ils soient, n'importe où ailleurs dans
le monde, si vous leur demandez "est-ce que vous voulez avoir une voix, un mot à dire dans votre avenir ?" ils vous diront"oui". Si vous leur dites "est-ce que vous voulez être
libre de l'intimidation d'un Etat", ils vous diront qu'ils veulent être exempts d'intimidation. Et donc, la démocratie, à mon avis, et le désir de liberté, est quelque chose
que tous les être humains ont en partage. Lorsque nous soutenons un peuple, un peuple qui souhaite avoir un avenir démocratique, lorsque nous le soutenons avec nos ressources
démocratiques, c'est parce que nous soutenons leurs efforts, ce n'est pas pour leur imposer la façon dont ils fassent leurs efforts. Ces réformes ont été préparées par les
Libanais. En Irak, en Afghanistan, pour des raisons de sécurité, et franchement pour des raisons humanitaires également, il a été nécessaire de participer à la libération
d'un peuple, et nous l'avons fait. Mais ce sont des occasions rares, beaucoup plus rares que les cas où nous soutenons des gouvernements qui viennent de prendre le pouvoir grâce
à des moyens démocratiques, des gens qui essayent de se libérer d'ingérences étrangères. Nous le faisons avec des échanges et le faisons également avec le secteur privé.
Cela est la politique des États-Unis. Les peuples du Moyen-Orient veulent réaliser la démocratie. Dans certaine circonstances, nous avons aidé à libérer les peuples de
régimes terribles mais dans d'autres pays, ils se sont libérés seuls : cela a été le cas du Liban, lorsque après l'assassinat de Rafic HARIRI, le peuple libanais a dit "cela
suffit !" Lorsqu'ils ont dit "cela suffit", le peuple américain a décidé de les aider.
QUESTION - A l'annonce de la conférence, j'ai décidé de venir parce que c'est une journée historique. Le Liban a besoin de ce genre d'initiatives
d'amour et pas seulement d'intérêt politique ; de solidarité, et de toutes ces valeurs humaines universelles que musulmans, chrétiens ou athées ont en commun. Vous avez aussi pu
réunir différentes cultures, religions et continents, de l'Amérique à l'Europe. Quel était le sens de cette initiative, M. le Président ? Deuxième question à M.
SINIORA : au Liban, il y a une majorité silencieuse depuis trente ans, qui n'a pas eu droit au chapitre sur les violences, depuis 1975. Quel sera son rôle aujourd'hui ? Enfin, M.
BARROSO, en tant que Président de la Commission européenne, l'Europe a-t-elle un engagement dans ce pays ?
LE PRESIDENT – Pour la question que vous m'avez posée, ma réponse est simple : pour moi, il n'y a pas d'autre solution que le dialogue des
civilisations et le dialogue des cultures. Hors le dialogue, il n'y a que de mauvaises choses.
M. Fouad SINIORA – Pour moi, il y a une question qui se pose ici : en effet, vous parlez de cette majorité silencieuse et, certes, il y a dans chaque
société, y compris dans la société libanaise, une majorité silencieuse. Eh bien, c'est à ces personnes que nous voulons parler, ainsi qu'à tous les autres Libanais,
pour leur montrer que nous travaillons pour eux, que ce soit en adoptant ce programme ou en essayant de travailler ensemble pour que tous les Libanais puissent vivre dans la liberté et
la dignité et qu'ils puissent s'exprimer sans intimidations. Ceux qui veulent vraiment travailler ensemble, ce sont ceux qui veulent construire leur avenir ensemble. Je vous parle de
cette majorité silencieuse et, en effet, nous travaillons pour eux. Nous les incluons bien sûr dans notre programme. Et notre programme a été fait pour ceux qui, à un certain
moment, ne pouvaient pas s'exprimer ; ils ont le droit de le faire aujourd'hui et de participer à la vie publique, de manière à pouvoir travailler de concert avec tous
leurs compatriotes pour le Liban auquel nous aspirons tous.
M. José Manuel BARROSO – Je voudrais dire que l'Europe est fière de la contribution qu'elle apporte au Liban aujourd'hui. Au nom de la Commission
européenne, j'ai annoncé une augmentation très importante de notre contribution et je l'ai fait en même temps que les différents gouvernements de l'Union européenne et d'autres
institutions de l'Union européenne. Ce n'est pas simplement une aide financière, c'est aussi l'attention, la solidarité -et la France est un bon exemple de cette attention et de
cette solidarité. Egalement, sur le plan de la stabilisation politique et militaire, ce sont les Européens qui ont répondu les premiers pour la FINUL qui, d'ailleurs, est maintenant
sous commandement italien. Je tiens d'ailleurs à remercier l'Italie et la France pour le rôle que ces pays ont assumé en engageant leurs militaires pour la défense et la
stabilité du Liban. C'est bien pour vous dire que l'Europe est fière de son héritage au Liban, telle la Phénicie, en Méditerranée, et que nous essayons de répondre par un « oui
» aux besoins du peuple libanais.
QUESTION – Ma première question vous est adressée, Monsieur le Président. Après cette conférence internationale de soutien au Liban, pourquoi ne
pas faire une autre conférence, pour le soutien à Israël, qui a beaucoup perdu d'argent avec cette guerre commencée par le terrorisme et le Hezbollah ?
Votre Altesse, une question pour vous : nous sommes voisins, il n'y a pas de guerre ni litige entre nous. Pourquoi ne pas faire un effort comme ce qui a été annoncé, par exemple, par
le Président égyptien, qui est venu en Israël, s'est adressé au Parlement israélien ? Pourquoi ne pas être un héros de la paix et faire un effort en faveur de la paix au
Moyen-Orient ?
Une question, enfin, pour le Premier ministre SINIORA. Il ne faut pas oublier que tout cela a commencé en raison de l'enlèvement de deux soldats, Ehud GOLDWASSER et Eldad REGEV, qui
ont été enlevés le 12 juillet par le Hezbollah. Vous nous avez dit hier que vous n'aviez aucune information sur leur sort. Ne pensez-vous pas que vous devez, en tant que Premier
ministre du Liban, faire tout ce qui est en votre pouvoir pour la libération de ces deux otages ?
M. Fouad SINIORA – Laissez-moi répondre d'abord, car il s'agit d'une question qui comporte plusieurs aspects. Si nous remontons au 12 juillet, c'est
vrai, il y a eu un incident le long de la « ligne bleue ». Mais est-ce bien la raison ? Tout le monde sait qu'Israël a occupé le Liban pendant 22 ans, depuis 1978, et ne s'est
retiré qu'après énormément d'atrocités infligées à ce pays. Le problème, c'est celui de l'occupation du Liban qui débouche sur tous ces autres problèmes. Il ne pourra
pas y avoir de solution réelle si nous ne pouvons faire face au problème lui-même, c'est à dire la poursuite de l'occupation dans les fermes de Chebaa, ou sur le plateau du
Golan, ou à Gaza, ou en Cisjordanie. C'est là, le problème.
Je pense que les Arabes ont pris une initiative extrêmement importante, c'est à dire l'initiative de la paix, alors que cette initiative n'a pas été reprise vraiment par les
Israéliens. Les Israéliens ont hésité et leur dernière initiative a été une attaque totalement disproportionnée. Ils ont traversé la ligne bleue en invoquant l'enlèvement de
ces deux soldats. C'est vrai, mais n'oubliez pas que Israël détient tellement de prisonniers depuis si longtemps, Israël a occupé les fermes de Chebaa, continue à violer
notre espace aérien. Chaque jour, le Liban paie très cher toutes les mines enfouies par Israël –il y a encore plus de 300 000 mines terrestres au Liban. Et nous ne savons pas où
sont ces mines, aucune carte n'a été fournie. En 36 heures, depuis la date de la résolution 1701, jusqu'à la cessation des hostilités, il y a eu 1 200 000 munitions qui ont
tué ou blessé un nombre considérable de personnes.
Et après la dernière attaque d'Israël au Liban, il faut bien tirer la conclusion que la force ne résout rien car, tous comptes faits, si nous devons vraiment vivre ensemble dans
cette partie du monde avec Israël, la seule source de sécurité est de construire de bonnes relations avec nos voisins. Et pour ce faire, il y a une bonne feuille de route, c'est
l'initiative arabe qui, en fait, prévoit une véritable solution, une solution durable et complète pour une paix juste, durable et complète au Moyen-Orient. C'est ainsi que tout le
monde arabe pourra vivre ensemble dans la paix et la prospérité, avec Israël. Cela, c'est vraiment « la » feuille de route qui pourra nous permettre de le réaliser. Il est grand
temps que nos jeunes et vos jeunes puissent vivre ensemble. Il faut tout faire pour éviter la violence, car la force a montré au cours de toutes ces décennies qu'elle ne débouche
sur rien, au contraire, sinon sur plus en plus de haine, d'inimitiés, sans que cela fournisse aucune forme de sécurité pour Israël.
QUESTION - Un grand remerciement pour vous, M. le Président. En tant que Libanaise, je vous remercie pour tous vos efforts pour mon pays. Et je vous
demande de faire passer un message à tous les Libanais, dans l'opposition et la majorité, pour le retour de la paix et de la stabilité et pour recevoir avec optimisme les
résultats réussis de Paris III. Pour mon Premier ministre, est-ce que vous allez retourner à Beyrouth ou rester ici, après les évènements qui ont eu lieu à Beyrouth ?
M. Fouad SINIORA - Non, je rentre à Beyrouth et je serai à Beyrouth.
LE PRESIDENT - Chère madame, ce n'est pas moi qu'il faut remercier. J'ai poursuivi une action et, si quelqu'un doit être remercié, c'est l'homme qui
a conçu, qui a compris l'action qui était nécessaire pour le Liban : c'est Rafic HARIRI. C'est lui qui a fait Paris I, qui a fait Paris II; certes, je l'ai aidé, et nous avons fait
Paris III, avec M. SINIORA, dans l'esprit qui était celui de M. HARIRI. M. HARIRI était un homme d'une extraordinaire intelligence, c'était un homme d'une immense générosité,
l'homme du dialogue des cultures, le contraire de l'homme qui se confrontait aux autres. C'était un homme de paix, qui a beaucoup apporté au Liban. Ceux qui l'ont assassiné ont
parfaitement compris ce qu'il représentait et ce qu'il faisait disparaître. Alors, si une pensée doit être adressée aujourd'hui par nous tous, Libanais, Européens ou autres, c'est
bien la pensée et l'hommage que nous devons rendre à Rafic HARIRI.
Je vous remercie.