Jérusalem, Israël, le mardi 22 octobre 1996
Béatitude,
Messeigneurs,
Très Révérends Pères,
Très Révérendes Mères,
Mes Pères, Mes Soeurs,
Chers Concitoyens,
Si j'ai choisi de vous recevoir -non sans quelques difficultés- ici à Sainte-Anne, dans la vieille ville de Jérusalem, c'est parce que ce lieu revêt pour moi une très profonde signification. J'ai parcouru cette ville ce matin, en j'ai essayé de la parcourir, du Saint-Sépulcre à la Porte St-Etienne, empruntant cette voie sur laquelle tant de pèlerins, et tant de pèlerins français, ont cheminé depuis des siècles, aboutissant à cette blanche église romane, l'un des chefs d'oeuvres les plus purs de l'architecture de cette ville. Sur cette église flotte le drapeau tricolore, le drapeau de la République.
Car Sainte-Anne, c'est comme un morceau de notre pays en terre sainte. Au siècle dernier, la Sublime Porte offrit l'édifice à la France qui en a confié la gestion aux Pères Blancs. Je les remercie de tout coeur, pour leur généreuse hospitalité.
Ma présence dans ce lieu, avec vous, est en réalité un peu plus qu'un symbole : c'est une fidélité que j'ai voulu honorer, c'est une tradition multiséculaire de participation active à la vie de cette partie du monde. C'est cette volonté constante que nous avons d'être acteur de son histoire parce que nos attaches, nos racines y sont profondes.
La fidélité : indépendamment de ses régimes, Monarchie, République, Empire, République encore, la France a joué un rôle primordial dans les Lieux Saints. Elle a exercé sa protection efficace sur les sites sacrés et les a défendus.
Mais c'est aussi sur des hommes et des femmes établis sur cette terre que la France entend faire porter sa protection, et l'a faite porter A travers les siècles, en dépit des vicissitudes, cette situation exceptionnelle a prévalu : il y a ainsi une longue liste d'établissements religieux que la France a le devoir de protéger. Elle assumera bien sûr cette obligation.
En évoquant ce rôle de la France auprès des établissements religieux, je veux rendre hommage à toutes les femmes et à tous les hommes qui les ont fait vivre, génération après génération : congrégations de prière, de contemplation, ou consacrées aux oeuvres, combien d'hôpitaux, d'hospices, d'orphelinats, d'écoles fondés ici et qui continuent, malgré la dureté des temps, à offrir leurs services aux habitants de cette terre ! Vous êtes la fierté de la France. Vous apportez le meilleur de vous-même dans ces contrées, et vous y avez amené notre langue en même temps que votre générosité.
Votre oeuvre, vous l'avez accomplie en vous intégrant. Votre intimité avec les chrétiens de Palestine est profonde. Au point que souvent on ne distingue plus ceux qui sont de l'extérieur de ceux qui sont de l'intérieur.
C'est à travers vous que je voudrais prolonger cet hommage à tous les religieux et religieuses de Palestine dont vous êtes, votre Béatitude, l'Eminent représentant. Hommes et femmes d'un peuple chrétien de terre sainte dont la France se sent très proche. Je voudrais saluer le courage de ce peuple qui a surmonté les épreuves à travers les siècles. Il est toujours là, certes moins nombreux mais jouant toujours un rôle essentiel, un rôle d'ouverture et de dialogue, un rôle de paix aussi.
Au moment où s'élaborent de nouvelles institutions, dans des conditions difficiles, je me tourne vers vous et je vous dis courage. Aujourd'hui comme hier, votre rôle demeure. Vous êtes indispensables. Ne désespérez pas. Ne quittez pas cette terre. Vous demeurez aujourd'hui, comme hier, une garantie de respect de l'autre et de tolérance pour la société qui se crée. En cela, vous êtes nécessaires à la paix.
Voilà pourquoi la France demeure résolument à vos côtés.
Dans le même esprit je veux dire ma reconnaissance à celles et ceux qui servent dans les services diplomatique, économique, culturel, au sein d'organisations internationales, dans les organisations non gouvernementales si nombreuses ici. Je sais le travail qu'ils font, jour après jour, dans des conditions difficiles. Mais leur ardeur et leur patience s'inscrivent dans cette continuité de la France sur cette terre, dans cette ville.
Une ville qui doit rester ouverte : ouverte aux Chrétiens de Palestine comme aux Chrétiens du monde ; ouverte à toutes les religions bien sûr. C'est dans l'ouverture et dans l'appartenance à tous que Jérusalem sera cette " ville de paix " au centre d'une zone de paix. Votre contribution y sera cruciale.
Je vous remercie.
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