Discours du Président de la République lors de l'installation du Haut Conseil de la mémoire combattante.

Discours de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors de l'installation du Haut Conseil de la mémoire combattante.

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Palais de l'Elysée, le mercredi 21 mai 1997

Messieurs les Ministres,

Monsieur le Chancelier de l’Ordre de la Libération,

Mesdames, Messieurs,

Mes chers Amis,

Nous sommes réunis aujourd’hui pour installer solennellement le Haut Conseil de la mémoire combattante.

Mes premiers mots seront pour vous dire combien il m’est agréable de saluer les personnalités qui le composent : votre compétence, vos titres et votre prestige vous ont désignés, Mesdames, Messieurs, pour siéger au sein de cette instance et je tiens à vous exprimer toute ma gratitude pour avoir accepté cette nouvelle responsabilité.

" Les événements s’écoulent, les yeux qui les ont vus se ferment ; les traditions s’éteignent avec les ans, comme un feu qu’on n’a point recueilli ; et qui pourrait, ensuite, pénétrer le secret des siècles ? " demandait Victor HUGO.

Votre mission est précisément de recueillir ce feu, de veiller sur lui, de l’entretenir, car ce feu, c’est notre mémoire, notre histoire, notre patrimoine ; en un mot, ce qui fonde la cohésion de notre nation.

Préserver le souvenir des hauts faits qui ont marqué au cours de ce siècle notre mémoire nationale et garder vivantes les valeurs pour lesquelles nous nous sommes battus, comme se sont battus nos pères et nos grands-pères, constitue une mission lourde et délicate, jamais achevée et qui doit se poursuivre. Les initiatives et les efforts de personnalités et d’associations issues du monde combattant l’ont assumée jusque-là de façon remarquable, avec un dévouement exemplaire. Il m’a semblé indispensable de perpétuer leur action et de pérenniser l’oeuvre de mémoire qu’elles avaient entreprise en donnant à cette mission une reconnaissance institutionnelle.

J’ai entendu pour cela toutes les parties concernées, et en particulier, le Premier ministre, M. Alain JUPPÉ, et le ministre délégué aux Anciens combattants et victimes de guerre, M. Pierre PASQUINI, qui a employé son ardeur et son dynamisme à faire aboutir ce projet et j’ai décidé de créer, par décret, le 9 janvier dernier, une instance spécifique, le Haut Conseil de la mémoire combattante pour lui confier cette mission.

Quel sera le rôle dévolu par la nation à ce Haut Conseil de la mémoire combattante ?

Sauvegarder la mémoire des guerres ou des conflits contemporains ; préserver les valeurs du monde combattant ; susciter et favoriser toutes les dispositions qu’il jugera utiles pour renforcer cette mémoire, que ces mesures soient éducatives et culturelles ou qu’elles concernent la recherche historique, voilà sa mission.

Mais il ne suffit pas de tirer les leçons de l’Histoire. Encore faut-il ne pas les oublier. C’est pourquoi il lui faudra veiller enfin, en toutes circonstances, au respect de ce qui constitue le fondement moral des valeurs pour lesquelles nos pères ont combattu.

Le Haut Conseil de la mémoire combattante reflète ainsi nos préoccupations, celles qui concernent la mémoire collective, comme celles qui touchent à la conscience nationale. C’est dire le rôle essentiel qui, au sein d’une démocratie vivante et forte, incombe à votre haute instance.

Le Haut Conseil de la mémoire combattante sera donc, Mesdames, Messieurs, cette autorité morale chargée de réconcilier les Français avec leur Histoire, de promouvoir la commémoration de tous les événements qui appartiennent à la mémoire de la République et de maintenir auprès des jeunes le souvenir des sacrifices de leurs aînés.

Il aura une mission générale de réflexion ; il aura une fonction de conseil et d’arbitrage dès lors que la mémoire nationale viendra à être sollicitée ; il luttera contre les tentatives de négation et les révisions de tout ordre ; il formulera des recommandations et des communications lorsque des controverses historiques mettront en cause la mémoire nationale ou les valeurs du monde combattant ; il s’attachera enfin à coordonner les politiques ministérielles pour mieux transmettre aux plus jeunes générations cet héritage qui constitue notre patrimoine.

Parce que les bûchers ne sont jamais éteints et que le feu peut reprendre, comme nous le rappelle Pierre SEGHERS, le Haut Conseil de la mémoire combattante sera ce veilleur qui lutte contre des forces sans cesse à l’oeuvre ; il sera ce veilleur qui défend ce qui fait la richesse inestimable de chaque individu ; ce veilleur qui défend l’homme et qui défend la liberté. C’est un combat qu’il mènera au service de chacun et au service de la France.

Parce que vous savez bien que rien n’est joué et qu’à l’Histoire qui déroule ses surprises, seul l’homme donne son sens ; que ce n’est pas une mystérieuse fatalité qui oriente le cours des affaires des hommes, mais leur volonté, ce Haut Conseil de la mémoire combattante sera pour nous et pour les générations à venir le symbole de l’espoir et de la confiance en ce que l’homme a de plus grand, de plus haut, de plus sacré : sa dignité d’homme.




Je déclare, installé, aujourd’hui 21 mai 1997, le Haut Conseil de la mémoire combattante.





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