Nancy, Meurthe et Moselle, le jeudi 6 mai 1999
Monsieur le Maire,
Vous venez de le rappeler, la période que nous traversons est difficile, mais vous le savez aussi, je tenais à cette rencontre.
L'autorité de l'État et les principes républicains ont été bafoués de manière inacceptable.
Je l'ai dit hier en Conseil des Ministres, tout doit être fait pour que soient restaurées l'exemplarité et l'efficacité de l'État.
Dans les moments difficiles, il faut revenir aux principes et retrouver à la fois le sens et l'esprit de l'État républicain. C'est le devoir et c'est l'honneur de ceux qui le servent.
Élus, responsables politiques, fonctionnaires civils et militaires, chacun a pour mission d'être au service de l'intérêt général, au service des Français. Chacun, à sa place, est responsable de quelque chose qui va bien au-delà de lui-même. Il doit en être fier. C'est cela le service de l'État, c'est cela le service de la Nation. C'est un engagement que chacun doit assumer dans la responsabilité, dans la clarté, dans le respect de la légalité républicaine. Cela s'appelle tout simplement le sens de l'État. Et je suis heureux, Monsieur le Maire, de le rappeler ici à Nancy.
Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les Élus, Mesdames, Messieurs,
Je voudrais vous remercier de tout coeur, Monsieur le Maire, Cher André ROSSINOT, de votre accueil toujours chaleureux et aussi des paroles amicales que vous venez de prononcer et auxquelles j'ai été sensible.
Vous avez, Mesdames, Messieurs, la chance de vivre dans un environnement très remarquable.
Forte d'un riche passé et forte d'atouts exceptionnels, votre ville entretient une vie culturelle particulièrement dense, vous l'avez souligné, dont le rayonnement s'exprime très au-delà de nos frontières.
Vous l'avez dit, Monsieur le Maire, Nancy, à travers de très nombreuses manifestations, affirme cette année sa vocation éminente dans les domaines du patrimoine et de l'esprit.
Le musée des Beaux-Arts a été entièrement rénové. Désormais, il donne à admirer, dans un environnement exceptionnel, un ensemble de peintures très riche et la prestigieuse collection des verreries de Daum qui contribuent si fortement à la renommée de Nancy.
Les nombreux événements organisés dans le cadre du centenaire de l'École de Nancy mettent en évidence les sources d'une démarche artistique originale qui, vous l'avez rappelé, selon Émile Gallé et Louis Majorelle, symbolisait une "alliance provinciale des industries de l'art". Quelle belle définition !
Le succès déjà rencontré par ces manifestations atteste de leur très grande qualité et je sais qu'elles ont mobilisé un nombre considérable d'artistes, de techniciens et de bénévoles.
Je voudrais saluer tout particulièrement ici celles et ceux, présents parmi nous, qui en ont été les maîtres d'oeuvre, les saluer et leur exprimer mon estime et ma reconnaissance.
Je voudrais leur dire, aussi, le regret qui est le mien de ne pouvoir visiter, comme nous l'avions prévu, comme je l'avais souhaité, les grands sites d'exposition qui témoignent du travail remarquable qu'ils ont accompli et qui placent votre ville, cette année, sur le devant de la scène culturelle internationale.
Les événements qui se déroulent actuellement et que vous avez évoqué, Monsieur le Maire, dans l'ex-Yougoslavie m'ont contraint, en effet, à modifier le programme de ce déplacement, avec votre accord.
Je sais que vous le comprenez car vous êtes, à Nancy, particulièrement sensibles au drame qui se déroule au Kosovo.
Les Nancéiens et la ville de Nancy ont exprimé de façon exemplaire leur solidarité envers les réfugiés du Kosovo. Il faut le souligner, vous devez en être fier, il faut les remercier.
Chez vous, cet élan de générosité est naturel et spontané, comme s'il s'agissait d'une évidence.
Sans doute l'histoire et la géographie expliquent-elles ici une sensibilité particulière à la souffrance des autres, dans un pays de frontière, lui-même souvent confronté aux vicissitudes de la guerre et aujourd'hui largement ouvert sur l'Europe.
Il s'agit d'ailleurs, en France, d'un mouvement général, et nous pouvons en être fiers.
Quand la souffrance fait irruption, quand les persécutions et la peur jettent des centaines de milliers de personnes sur les chemins de l'exode, quand, à nos portes, l'humanité s'acharne à devenir le contraire d'elle-même, les Français démontrent qu'il y a place encore pour l'espoir et la fraternité. A travers leur engagement personnel, la solidarité retrouve un visage, une parole, des gestes. C'est la promesse qu'un autre ordre l'emportera, fondé sur le droit et sur le respect des différences, un ordre qui témoignera aussi de la vitalité de notre idéal européen.
La solidarité dont vous faites preuve est aussi l'expression d'une volonté européenne, également d'une capacité d'écoute et d'entraide ancrée ici depuis bien longtemps.
La Meurthe-et-Moselle et Nancy ont souvent été précurseurs en matière d'action sociale et d'aide aux plus démunis. Pour l'emploi, pour l'insertion, il faut faire confiance, vous l'avez dit tout à l'heure, Monsieur le Maire, aux énergies locales, leur ouvrir de nouveaux champs d'action, privilégier les logiques de responsabilité sur les logiques d'assistance.
Les mutations économiques qui ont durement affecté la région au cours des dernières décennies, et la nécessité d'y faire face, ont entraîné une mobilisation des acteurs sociaux à la recherche de solutions toujours plus efficaces aux différentes situations de détresse ou d'exclusion.
Cette solidarité active, confortée par l'aide de l'État, par celle des collectivités territoriales et de l'Europe, a accompagné une politique de reconversion et de développement économique qui porte ses fruits.
Autrefois capitale de la sidérurgie, Nancy a su reconvertir son tissu économique en s'appuyant sur un très remarquable potentiel universitaire, scientifique et technique, et en pariant très tôt sur l'essor des nouvelles technologies.
Séduites par ces atouts majeurs et par une situation géographique privilégiée, au coeur du grand marché européen, de nombreuses entreprises étrangères sont venues s'implanter dans votre région.
Pour assurer son avenir, Nancy valorise aussi la richesse de son patrimoine, à travers un tourisme actif, et la vitalité de ses traditions, notamment son savoir-faire de renommée internationale dans les métiers du verre.
Chacun sait le rôle déterminant que vous avez joué, Monsieur le Maire, je peux en porter témoignage, pour maintenir vivante et bien présente au coeur de la ville la tradition verrière de Nancy qu'incarne l'entreprise Daum.
Certes, je n'ignore pas les interrogations des Nancéiens devant certaines difficultés, séquelles des crises passées ou évolutions nouvelles vécues avec inquiétude.
Je sais les préoccupations que suscite la perspective de nouvelles mesures de restructurations dans le domaine de la défense.
Je veux vous assurer, Monsieur le Maire, Mesdames, Messieurs, de mon souci de veiller à ce que la solidarité nationale s'exprime de la façon la plus large et permette de concilier, dans les meilleures conditions, l'aboutissement de la réforme en cours et la poursuite du développement économique de Nancy.
Celui-ci s'appuie, c'est une autre de ses caractéristiques, sur une coopération transfrontalière ancienne et dynamique, notamment avec ses partenaires allemands et polonais.
Dictés par la géographie et l'histoire, ces liens se sont continuellement renforcés sous l'effet d'une volonté partagée. La qualité et la richesse de ces relations d'échange m'ont conduit à choisir Nancy pour accueillir la première réunion, en France, du Sommet de Weimar.
Tournée vers l'avenir et vers ses voisins européens, fidèle à ses traditions, au coeur d'une agglomération parmi les plus importantes de France, Nancy assume son développement économique. Celui-ci s'appuie sur une attention permanente aux exigences de la cohésion sociale et sur une capacité remarquable à innover et à entreprendre pour valoriser de réels atouts.
Aussi, je veux vous dire, Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs, en même temps que mes encouragements à poursuivre l'oeuvre engagée, la confiance qui est la mienne dans l'avenir de Nancy, de votre si belle cité.
Je vous remercie.
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