Palais de l'Élysée, jeudi 20 novembre 2003.
Monsieur le Premier Ministre, Messieurs les Présidents, Messieurs les Ministres, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Mesdames et Messieurs les Recteurs, Mesdames et Messieurs les Inspecteurs Généraux, Mesdames et Messieurs les Inspecteurs d'Académies, Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,
Depuis plus d'un siècle, la République et l'école se sont construites l'une avec l'autre. L'école a été le rêve de la République. Et elle reste sans aucun doute la plus belle de ses réussites.
Permettre à chaque esprit de conquérir sa liberté, faire vivre l'égalité des chances, donner corps à la fraternité en faisant de tous les élèves les enfants de la République, nourris du même savoir et de la même culture : voilà les objectifs que la France s'est fixé lorsqu'elle a instauré l'enseignement gratuit, laïque et obligatoire.
Notre pays ne rendra jamais suffisamment hommage à toutes celles et tous ceux, instituteurs, professeurs, personnels d'encadrement, personnels administratifs et techniques qui, forts de leur savoir-faire, mais plus encore de leur engagement, ont su accueillir et former des générations toujours plus nombreuses. Grâce à eux, grâce à leur rôle de passeurs, l'école n'est plus celle des " héritiers " mais bien celle de tous. Sans eux, la France ne serait évidemment pas ce qu'elle est. Toutes celles et tous ceux qui, dans l'enseignement public comme dans l'enseignement privé, ont choisi de se consacrer à l'éducation de nos enfants remplissent la plus noble des missions, la plus essentielle qui soit.
Pourtant, chacun le sent bien, notre système éducatif marque un peu le pas. Il cherche un nouveau souffle. Au fil des crises, l'école exprime une forme de désarroi. Elle s'interroge sur le contenu de ses missions, sur ce qu'elle peut enseigner, sur ce qu'elle doit refuser. Elle dit son doute, son scepticisme, devant des réformes toujours plus nombreuses, pas toujours appliquées, rarement évaluées. Elle interpelle l'Etat. Mais, plus encore, elle interroge la nation.
Le moment est venu, je pense, pour notre pays de se rassembler autour de ce qu'il désire pour sa jeunesse et de renouveler le pacte qui le lie à son école. Tel est le sens du débat que j'appelle de mes voeux, et qu'a engagé le Gouvernement, débat sur l'avenir de notre système éducatif. Un débat ouvert bien sûr à toutes et à tous, aux praticiens de l'école naturellement, mais aussi à toutes les familles, à toutes les professions, à tous les Français. Car l'école est notre patrimoine commun. Un débat, je le souhaite, exemplaire, par sa méthode et son ampleur, qui marquera une étape dans la modernisation de notre vie publique.
Et surtout un débat pour agir, puisqu'il débouchera sur l'adoption d'une nouvelle loi d'orientation fondant le nouveau projet éducatif de la France.
Ce n'est pas dans la nostalgie que l'école construira son avenir. C'est en regardant devant elle, avec confiance, qu'elle restera fidèle à son héritage : celui de Condorcet, de Jules Ferry et de tant d'autres. Pensons que les enfants qui entrent aujourd'hui en maternelle quitteront le système éducatif vers 2020. Le monde, l'Europe, la société changent et l'école, comme à toutes les étapes de son histoire, a le devoir d'anticiper ce changement. A nouvel environnement, nouvelle ambition et surtout nouvelle méthode. * * * L'école résonne de tous les défis qui traversent notre société.
Défi d'un monde toujours plus ouvert. Pour les jeunes, l'horizon n'est plus, loin s'en faut, celui que dessinent nos frontières. Ils auront besoin de clés nouvelles pour maîtriser leur destin. Pour faire face à cette mondialisation riche de promesses mais aussi d'interrogations et d'inquiétudes. Pour mieux connaître nos voisins de l'Union européenne, qui sont chaque jour davantage nos concitoyens. Pour porter pleinement, en Europe et dans le monde, ce modèle d'humanisme que la France incarne et qu'elle défend sur la scène internationale.
Défi de la société du savoir. La connaissance est la clé du développement individuel et le fondement de la richesse des nations. A mesure que l'âge de l'information succède à l'âge industriel, l'ignorance est plus encore qu'hier synonyme d'exclusion. Notre école a le devoir de préparer les générations futures à cette évolution majeure de nos économies. Leur donner les ressources nécessaires pour se former tout au long de la vie et se mouvoir avec aisance dans cette société du changement et de l'échange. Dans les vingt ans qui viennent, la France aura besoin de plus de savoirs, de plus de compétences, de plus de qualifiés, de plus de diplômés. Pour assurer la croissance et l'emploi, elle doit résolument poursuivre l'élévation du niveau des connaissances. Elle doit faire naturellement le pari de l'intelligence.
Défi enfin de la cohésion nationale. C'est à l'école que se forge l'adhésion aux valeurs que nous avons en partage et aussi que s'acquièrent les règles de comportement qui expriment ces valeurs : l'esprit de responsabilité, le respect de l'autre et le respect des devoirs civiques, la tolérance et la solidarité. Demain comme hier, l'école de la France doit être et sera l'école de la République.
Tous ces défis rencontrent un moment particulier de notre histoire.
Comme viennent de le confirmer le diagnostic préparé par le Haut Conseil de l'évaluation de l'école et les travaux de la Commission que préside M. Claude Thélot, auxquels j'exprime toute ma reconnaissance, l'école a atteint une sorte de palier. Après des décennies de progression, le nombre des élèves se stabilise. Malgré des moyens toujours plus importants, plus de 100 milliards d'euros par an, l'un des efforts les plus élevés au monde, les résultats plafonnent, parfois régressent. Le pourcentage d'étudiants issus de familles modestes ne progresse plus. Des zones d'ombre persistent qui sont autant de blessures : insuffisante maîtrise des savoirs fondamentaux à la sortie du primaire ; échec trop élevé en fin de scolarité obligatoire ; dégradation des relations d'autorité entre les adultes et les jeunes; développement préoccupant des incivilités et de la violence ; inégalités inacceptables entre établissements scolaires. Autant de difficultés auxquelles se sont attaqués, sous l'impulsion et l'autorité du Premier ministre, M. Luc Ferry et M. Xavier Darcos.
La France ne saurait laisser perdurer à l'école, c'est-à-dire au coeur même de la République, ces ferments d'inégalité. C'est dire l'enjeu du débat qui s'ouvre : tracer un nouveau chemin pour l'école. Forts d'un diagnostic partagé, sachons nous réunir pour assurer l'avenir de nos enfants. Sachons dépasser des clivages d'un autre temps. Le débat sur l'école a été trop longtemps confisqué. Il n'est l'apanage d'aucun camp, d'aucun parti, d'aucun clan. Il est temps qu'il soit rendu aux Français.
Ce débat est l'occasion de s'unir sur l'essentiel. C'est un débat pour agir. Agir pour rendre notre école plus sûre de ses valeurs, plus efficace, plus juste. Agir pour répondre aux grandes questions qui se posent aujourd'hui à notre système éducatif :
- assurer la transmission des valeurs républicaines pour que notre école soit véritablement l'école du respect et de la compréhension de l'autre ;
- garantir, dès le plus jeune âge, la maîtrise de la lecture, afin qu'elle soit pour chaque élève l'alliée de toute une vie dans la découverte du savoir ;
- mieux reconnaître la diversité des talents et offrir à tous, au sein du collège, un véritable parcours de réussite ;
- et enfin tirer le meilleur parti des ressources et des compétences exceptionnelles que notre pays consacre et continuera à consacrer à l'éducation. * Et d'abord, parce que c'est essentiel, faire partager par chaque enfant, notamment ceux qui entrent dans la communauté nationale, les valeurs, l'originalité, la force du message français.
Apprentissage d'abord du respect de l'autre, quelles que soient son histoire, ses croyances et ses appartenances. L'école, où se transmettent la tolérance et le sens du dialogue, doit impérativement être préservée de ces injures à l'humanisme que sont l'antisémitisme, le racisme et la xénophobie. Respect de l'égalité entre les sexes et respect des droits des femmes. Contre la montée des communautarismes, l'idéal universaliste et émancipateur de l'école française doit être inlassablement rappelé, expliqué, appliqué. Les jeunes doivent y apprendre l'histoire, celle de la nation, de ses institutions, ils doivent y apprendre à respecter son hymne et son drapeau, qui a naturellement sa place dans chaque établissement. Ils doivent y apprendre le sens profond de la laïcité qui permet d'accueillir dans un creuset commun toutes les différences : la laïcité est et restera l'une des valeurs primordiales de l'institution scolaire.
Apprentissage ensuite du respect des règles et de l'autorité. C'est pour notre école une question de survie. Respect des enseignants, parfois en butte à des comportements inacceptables, à des propos inadmissibles, qui remettent en cause leur autorité, celle de leur savoir et leur dignité. Je veux leur dire qu'ils peuvent compter sur l'appui et sur la détermination de l'État. S'il faut se réjouir des premiers résultats enregistrés, il faut aller plus loin, beaucoup plus loin et réduire massivement, avant la fin de la législature, le nombre d'incidents graves recensés dans les établissements scolaires. Respect des élèves également qui en ont autant besoin que des interdits et des limites pour construire leur personnalité. Respect des règlements qui ne sont pas un ensemble de procédures tatillonnes, mais la traduction du projet éducatif dont l'école est porteuse.
Comment une société pourrait-elle à ce point douter d'elle-même qu'elle en vienne à ne plus être capable d'affirmer et de faire respecter ses valeurs pour protéger ses enfants ? Comment l'école, dont le principe même est de rassembler les enfants les plus divers, pourrait-elle être une communauté sans repères ? L'école doit être, doit redevenir quand cela s'est perdu, le lieu de la transmission des valeurs partagées, le lieu de la responsabilité. L'éducation civique doit jouer là tout son rôle. Il n'y a pas d'égalité devant la loi sans respect des lois communes. II n'y a pas de liberté si cette liberté n'est pas établie pour tous.
Plus sûre des valeurs qu'elle porte, notre école devra aussi être plus efficace et plus juste.
Nous avons tous la même ambition. Elle est simple : offrir à chaque enfant, à 100% d'une classe d'âge, y compris aux enfants handicapés trop longtemps exclus, les clés de l'accomplissement personnel. La scolarité obligatoire doit être pour chaque enfant un parcours de réussite, qui l'amène au meilleur de lui-même, qui lui permette de trouver sa voie et sa place dans la société. Sans préjuger bien évidemment des résultats du débat qui s'ouvre et qui s'engage, cela impose de se poser au moins trois questions.
D'abord, comment assurer, dès le plus jeune âge, la maîtrise des savoirs fondamentaux, et au premier chef de la lecture qui est la clé de tous les apprentissages ?
La question est ancienne mais la réalité est là : quand 15% d'une classe d'âge a du mal à lire, comment ne pas s'interroger sur l'organisation des premières années de l'école ? Sur l'efficacité, sur l'évaluation des méthodes d'apprentissage de la lecture ? Sur la formation et le soutien pédagogique apportés aux professeurs mais aussi sur la valorisation des bonnes pratiques et de l'expérience ? Sur la détection des difficultés des élèves et la manière de remédier à ces difficultés ? Sur la reconnaissance, peut-être de façon plus solennelle, de l'acquisition de la lecture ? Sur cette question cruciale, je souhaite que le débat permette une avancée décisive en identifiant les blocages et en faisant connaître les meilleures façons de faire. Un élève qui quitte l'école primaire doit naturellement savoir lire et écrire.
Comment ensuite développer des solutions éducatives plus diversifiées au collège pour que le collège unique devienne véritablement un collège pour tous ? Là non plus la question, il est vrai difficile, n'est pas nouvelle. Trop souvent, le généreux principe d'égalité des chances s'est traduit par l'idée qu'il faudrait imposer un enseignement uniforme. Cette uniformité a pu, sans que nous en ayons toujours conscience, faire naître ici ou là de graves inégalités. Apprenons à mieux respecter la diversité des élèves. Apprenons à mieux valoriser la variété des parcours, des qualifications et des voies de réussite qu'offre une société moderne. La France a besoin de toutes les compétences et de tous les talents. Au terme de la scolarité obligatoire, chaque élève doit avoir acquis un socle fondamental de savoirs, de compétences et de règles de comportement qui le prépare pleinement à sa vie d'adulte, qu'il fasse le choix d'études plus longues ou qu'il décide d'entrer plus tôt dans la vie active.
Définir ce socle commun. Définir la diversité des parcours dans l'enseignement secondaire. Permettre à toutes les voies -voie professionnelle, voie de l'alternance, voie technologique, voie générale- de déboucher sur le plus haut niveau possible de qualification et ménager toutes les passerelles, dans le cadre de la formation initiale et continue. Sur tous ces sujets, j'attends du débat qu'il débouche sur des propositions fortes.
Sur ce parcours de réussite que nous voulons construire, l'information de chaque élève et de sa famille est essentielle. C'est l'une des principales sources d'inégalité. C'est l'un des domaines où les parents et les jeunes se sentent souvent le plus démunis. Un carrefour d'orientation doit être offert à chaque collégien, avec la participation de sa famille, pour faire un point précis sur ses acquis, apprécier toutes les voies qui s'offrent à lui et lui signaler les filières auxquelles, par méconnaissance, parfois par auto-censure, il n'aurait peut-être pas songé.
Comment enfin assurer une meilleure ouverture sur le monde ? Certes, l'éducation demeure, et ceci n'est évidemment pas discutable, dans le champ de la souveraineté nationale. Mais le modèle français ne pourra que se renforcer en s'ouvrant davantage sur l'extérieur, en participant aux évaluations internationales, en contribuant à définir des objectifs communs. Par ailleurs, dans une Europe élargie, la maîtrise des langues étrangères sera chaque jour un peu plus indispensable. Développement dans chaque académie des sections européennes et des établissements à vocation internationale. Intensification des échanges linguistiques et des jumelages. Cursus progressifs, cohérents et lisibles, de l'école primaire jusqu'à l'université pour l'enseignement des langues. L'apprentissage dès le primaire doit permettre que tous les étudiants sachent vraiment parler deux langues étrangères.
Plus sûre de ses valeurs, plus efficace dans ses méthodes et dans ses résultats, notre école sera plus juste. L'égalité des chances est au coeur du débat. Elle appelle sûrement, elle aussi, de nouvelles réponses. Nous savons, pour ne citer que cet exemple, les difficultés très lourdes auxquelles sont confrontés un certain nombre d'établissements, souvent dans des zones sensibles. Au même titre qu'il existe une politique de la ville, qui concentre les aides publiques sur quelques quartiers, ces établissements, identifiés de longue date, exigent des efforts particuliers et des projets innovants, voire expérimentaux. Il faut que l'éducation nationale réponde pleinement à ce défi, en bâtissant pour eux un plan, inscrit dans la durée et régulièrement évalué. * Nouvel environnement, nouvelle ambition, et surtout nouvelle méthode. Car au-delà des finalités sur lesquelles, j'en suis convaincu, nous pouvons aisément nous accorder, c'est avant tout la question du chemin, des modalités de l'action, à laquelle il est temps de répondre. Ne nous déchirons pas à l'infini sur des débats inutiles et stériles. Mobilisons-nous d'abord sur la façon d'atteindre les objectifs que nous avons en partage. Entre la crise et l'immobilisme, il y a une autre voie possible. Le débat doit être, je le souhaite, l'occasion d'explorer sans tabou, avec lucidité et honnêteté, tous les leviers du changement afin de construire cet avenir de confiance dont nous avons le plus grand besoin. Priorité de l'action publique, premier budget de la Nation, l'école doit évidemment être le premier chantier de la réforme de l'Etat.
Je sais que les personnels de l'Education nationale, et notamment les jeunes professeurs, souhaitent ce changement. S'ils expriment aujourd'hui leurs interrogations, c'est souvent parce qu'ils se sentent oubliés, négligés, entravés par un système, des règles ou tout simplement des habitudes qui ne répondent plus aux réalités auxquelles ils sont chaque jour confrontés dans la solitude de leur classe. Notre enseignement s'est construit sur des principes, des règles qui remontent pour certains à l'avant-guerre, à une époque où le métier de pédagogue était sans aucun doute plus facile. Comment n'aurions-nous pas à nous interroger sur l'évolution, la modernisation et la valorisation de ce métier ?
Le constat qui vient d'être établi nous invite à nous interroger sur la façon d'améliorer le fonctionnement de nos établissements, de mieux accompagner les missions et la carrière des professeurs et plus encore de promouvoir un véritable dialogue à l'école.
L'éducation est nationale. Et elle le restera, naturellement. Mais les collèges et les lycées de demain auront besoin de plus de souplesse. Ils devront être plus autonomes. Donner toute leur place, sur le terrain, aux enseignants, aux équipes éducatives, aux chefs d'établissement. Faisons le choix de la confiance. Engageons-nous, là comme ailleurs, dans cette culture d'objectifs, de contrats, avec une obligation de résultats et une évaluation digne de ce nom. Nous sommes capables de dresser un diagnostic partagé sur notre école. Soyons capables d'en tirer les conséquences. Notre pays consacre plus de 7% de sa richesse à l'éducation. Ce chiffre a doublé depuis quinze ans. Des marges de manoeuvre existent, beaucoup plus importantes qu'on ne le croit. Nous devons savoir les utiliser.
Dans le même esprit, l'Etat doit se montrer exemplaire à l'égard de toutes celles et de tous ceux qui ont choisi de se consacrer à l'éducation. L'école vit par les femmes et par les hommes qui lui donnent corps. Plus d'un fonctionnaire sur deux de l'Etat se consacre à l'enseignement. Nous devons à celles et ceux qui transmettent leur savoir à nos enfants une considération particulière. Au moment où une génération de professeurs passe le flambeau à une autre et qu'ils nous disent leurs difficultés croissantes dans l'exercice de leur métier, dans sa reconnaissance par la nation, il est vital pour l'avenir de notre pays que l'Etat sache, comme par le passé, susciter les vocations et les talents nouveaux dont l'école a besoin.
Pour cela, n'est-il pas temps d'ouvrir le grand chantier du métier d'enseignant ? Soutien matériel et moral aux jeunes professeurs lors de la prise de leur premier poste. Réforme des IUFM, pour améliorer la formation initiale en donnant toute leur place à la pratique et à l'expérience sur le terrain. Réflexion ouverte sur les obligations de service pour favoriser la réussite des élèves, mieux prendre en compte les besoins des établissements ou la situation des personnels. Aide et soutien en cours de carrière à partir d'évaluations transparentes dégageant les succès et les difficultés. Possibilité d'approfondir ses connaissances à différentes étapes de sa carrière, par exemple à travers un droit individuel à la formation comparable à celui que les partenaires sociaux viennent de créer. Possibilité d'exercer de nouvelles responsabilités dans les établissements à certains moments de son parcours, et notamment en fin de carrière. Possibilité de s'engager dans une deuxième carrière ou de prendre pour quelque temps d'autres fonctions dans l'administration ou dans le secteur privé. Les chantiers ne manquent pas. Je suis convaincu que le débat révélera bien des opportunités.
Mais, sur tous ces sujets, nous ne progresserons que par le dialogue. Dialogue avec les parents et les familles, pour qui cet univers reste encore trop hermétique. Ce n'est pas contester l'autorité des maîtres que d'encourager cet échange et de veiller à mieux informer les familles, à les associer davantage à la vie des établissements. Dialogue avec les élus, afin de tirer tout le parti possible du nouveau partage entre l'État et les collectivités territoriales ainsi que des initiatives locales, notamment dans le domaine des activités périscolaires, culturelles ou sportives. Dialogue avec les employeurs, privés comme publics, pour un meilleur équilibre entre enseignement et situations d'apprentissage en milieu professionnel et, par là même, une insertion mieux assurée des jeunes dans la vie active. Dialogue enfin avec tous les personnels de l'éducation nationale et leurs représentants sans lesquels naturellement rien ne pourra se faire.
Au coeur du débat qui s'ouvre, sachons aussi entendre les jeunes eux-mêmes. Qu'ils soient collégiens, lycéens, apprentis ou étudiants, à toutes et à tous, je veux dire que c'est bien d'eux et de leur avenir qu'il est aujourd'hui question. Qu'ils ne se laissent pas gagner par le doute, le scepticisme ou le désenchantement. L'école, ne l'oublions pas, est une chance autant qu'une conquête. Si tout ne s'apprend pas dans une classe, c'est là que chaque élève construit, avec ses professeurs, sa vie d'adulte. C'est en pensant à notre jeunesse, à sa capacité d'engagement, à sa soif d'idéal que nous devons conduire nos réflexions. Nous avons le devoir de lui offrir la meilleure école possible. * Dans un monde en mouvement, beaucoup de nos voisins ont entamé ces dernières années la réforme et l'adaptation de leur système éducatif. La France s'y engage aujourd'hui avec détermination, dans la fidélité aux valeurs du service public auxquelles elle est, chacun le sait, profondément attachée.
Depuis longtemps, notre pays se bat sur la scène internationale, à l'ONU, à l'UNESCO, à l'OMC, au sein de l'Union européenne, la France se bat contre la marchandisation de la culture et de l'éducation. Pour nous, culture et éducation ne sont pas et ne peuvent pas être des biens comme les autres, livrés aux fluctuations des marchés. Elles expriment ce que les peuples et les nations ont de meilleur, leur vision de l'homme et de son destin, leur confiance dans l'avenir et le progrès. Elles disent aussi leur ambition pour un monde qui donne toute sa place à la justice et à l'émancipation des hommes et des femmes.
L'école de la République, ciment de la nation, est à la source même de l'identité française. Nous lui donnerons un nouvel élan si chaque Française et chaque Français prend conscience de tout ce qui le rattache à cette grande institution. Si nous l'aimons suffisamment pour en faire un projet partagé, pour y investir notre travail et notre volonté, pour accepter de gommer certaines de nos différences en participant à cette aventure collective. Et nous ne saurions être trop exigeants. N'oublions pas que l'école est une échelle tendue vers l'avenir. Pour devenir réalité, elle doit d'abord être ambition.
Ce débat national est une chance pour notre pays. Je veux remercier ici toutes celles et tous ceux qui en assurent la préparation, la coordination et la synthèse. Pour ma part, je l'aborde sans a priori, avec le souhait qu'il nous permette de trancher collectivement des questions complexes mais essentielles, loin des querelles partisanes et des affrontements passionnés dont nous avons bien souvent en France le secret. Il doit, une fois encore, être un débat pour agir. Et j'invite chacune et chacun à lui apporter le meilleur de lui-même pour qu'ensemble nous construisions l'avenir, l'avenir de notre école, notre avenir, celui de la France.
Je vous remercie.
|