Palais de l'Elysée - jeudi 6 janvier 2005.
Monsieur le Doyen,
Monsieur le Président de l'Organisation Internationale de la Francophonie, Cher ABDOU DIOUF,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les Chargés d'affaires,
Je voudrais tout d'abord vous remercier très sincèrement, Monsieur le Doyen, pour les vœux que vous venez d'exprimer pour mon pays et aussi pour moi-même. J'y ai été particulièrement sensible. Vos propos sont toujours chaleureux et amicaux et ils me touchent beaucoup.
Et c'est avec plaisir que j'adresse en retour mes vœux les plus cordiaux et les plus amicaux aux chefs d'Etat, aux gouvernements et aux peuples que vous représentez ici, avec tant de distinction, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs. Je forme également des vœux pour vous-mêmes, pour vos familles, pour vos collaborateurs et pour celles et ceux qui vous sont chers. Je tiens à vous remercier pour l'œuvre que vous accomplissez ici, avec intelligence et détermination, au jour le jour, au service du renforcement de l'amitié entre votre pays et la France.
J'aurai tout à l'heure, Monsieur le Doyen, l'occasion d'évoquer devant l'ensemble du corps diplomatique le drame qui a frappé l'Océan indien dans son ensemble et la réaction de solidarité légitime qu'il a provoquée. Les deuils, les douleurs, les conséquences, à la fois sociales, économiques que comporte ce drame sont immenses. C'est probablement l'un des plus importants que l'histoire contemporaine aura connu. Vous me permettrez simplement de m'associer à ce que vous avez dit au sujet des pertes humaines et matérielles qui ont caractérisé cette affreuse circonstance. Je l'évoquerai tout à l'heure.
Notre rencontre annuelle, à laquelle nous sommes attachés, témoigne d'une relation privilégiée qu'expriment les accords particuliers conclus entre la France et les pays avec lesquels elle entretient les liens les plus intenses et les plus solides. Elle exprime une grande proximité, découlant d'une même vision, d'une compréhension, d'une volonté de servir nos intérêts communs et d'œuvrer ensemble pour la paix et pour la solidarité dans le monde, comme vous l'avez évoqué, M. le Doyen.
L'année qui vient de s'achever nous rappelle que nous ne pouvons nous permettre aucune relâche dans la poursuite de ces objectifs.
En ce qui la concerne, la France est disposée, plus que jamais, à manifester son soutien, à apporter sa contribution pour donner tout son sens à cette relation si singulière qu'elle a nouée avec vos pays.
Une histoire partagée, la fraternité d'armes, les liens de la langue et de l'échange culturel ont tissé ce réseau dense d'amitiés et d'intérêts communs que nous avons à cœur de préserver. Du fait de notre proximité, la coopération entre nos pays a pu utilement couvrir les domaines les plus larges, aussi bien le développement économique et social, que la protection de l'environnement ou l'enrichissement culturel.
Si la France est présente en Afrique, et même si présente en Afrique, c'est d'abord par un mouvement dont l'origine plonge dans l'histoire. C'est aussi en raison de solidarités de voisinage qui se sont bien souvent transformées en affinités électives. C'est pour les mêmes motifs que vos compatriotes sont si présents en France. Je pense notamment aux 100 000 étudiants, vous les avez évoqués, venus de chez vous et à qui j'adresse tous mes vœux de réussite et de bonheur en ce début d'année pour leurs études en France et ensuite pour le développement de la carrière dans leur pays.
Si la France est si présente en Afrique c'est aussi parce qu'elle souhaite traduire cette solidarité dans les faits. C'est parce qu'elle sait que cet engagement rencontre le souhait des gouvernements et des populations. Et c'est pour cela que cette présence n'est pas de l'interventionnisme mais qu'il s'agit, dans notre esprit, d'un véritable partenariat.
Si la France s'engage résolument en faveur de l'Afrique c'est parce que ses causes sont justes, qu'elles sont insuffisamment prises en compte par la communauté internationale. C'est aussi parce que l'appui des africains ne nous a jamais manqué, dans nos combats pour la liberté au siècle dernier, et aujourd'hui pour promouvoir un ordre international plus équitable. Ensemble nous y contribuerons, et nous y contribuerons toujours, lors du prochain sommet de l'ONU.
Dans le même esprit, aux aurores des indépendances, nous avons répondu aux besoins de sécurité par des accords de coopération militaire, des accords de défense, la présence de contingents dans certains pays. Depuis, nous soutenons la montée en puissance de la capacité africaine de prévention des conflits et de gestion des crises, par notre dispositif RECAMP ou l'appui aux écoles régionales de formation militaire.
Oui, ensemble nous avons pu œuvrer utilement pour le progrès et pour la paix et tout nous porte à poursuivre, à condition bien sûr que ce soit voulu, dans un climat de confiance et d'amitié sans lequel on ne peut rien construire. Il n'y a rien d'impérieux dans notre démarche et nous n'avons pas vocation à rester là où nous ne sommes pas souhaités. Cela va de soi.
En Afrique, comme dans le reste du monde, la France n'impose pas sa présence, elle n'est pas sous l'influence d'intérêts économiques, elle limite à la sécurité et à la formation le rôle de ses contingents qui y stationnent avec toujours l'accord des Etats ou sous le mandat international.
La communauté internationale, unanime, s'est investie pour faire progresser le processus de réconciliation en Côte d'Ivoire. La France participe à cet effort d'apaisement avec d'autant plus de conviction qu'il s'agit d'un pays pour nous ami de très longue date.
C'est ce retour à la paix civile que la France cherche à encourager. Elle ne cherche rien d'autre. Après avoir préservé les Ivoiriens de la guerre civile, elle souhaite aussi les aider à se retrouver pour reconstruire le pays rassemblé et prospère qui fut le leur.
Le temps presse car l'épreuve n'a que trop duré pour la Côte d'Ivoire comme pour l'Afrique de l'Ouest. Gardons espoir car le mécanisme de sortie de crise existe : il suffit que les acteurs ivoirien, tous les acteurs ivoiriens, l'appliquent de bonne foi comme ils s'y étaient engagés l'été dernier à Accra.
Au-delà de cette mission, la France soutient d'autres processus de paix. Elle soutient l'action de la communauté internationale pour résoudre des conflits et répondre à des crises humanitaires. C'est le cas en Centrafrique, au Darfour, au Burundi et en RDC.
Ainsi, plus que jamais, la France soutient l'ambition d'une Afrique forte, capable de s'organiser, de défendre ses intérêts, de relever les défis de la mondialisation : une Afrique qu'incarne si bien, aujourd'hui, le dynamisme de l'Union africaine.
L'année 2005 nous offre de nouvelles occasions de travailler ensemble, concrètement, à l'émergence de ce nouveau partenariat qui s'esquisse depuis déjà plusieurs années.
Elle verra notamment l'achèvement des premières ''évaluations par les pairs''. Leurs conclusions seront cruciales pour le succès du NEPAD.
C'est l'esprit même du NEPAD que de souligner que le progrès économique doit être au service du développement durable qui respecte les équilibres sociaux, culturels et écologiques. C'est dans cette logique que la France organisera, dans quelques semaines, un Sommet sur la biodiversité, et que dans quelques mois, une conférence internationale sur le microcrédit aura lieu également ici.
Comme vous le savez, la France a facilité en 2004 la tenue du sommet pour la gestion durable des ressources en eau du bassin du Niger. Dans le même esprit, elle soutiendra cette année les efforts des pays d'Afrique Centrale pour organiser la protection des forêts des pays du bassin du Congo.
Enfin, pendant toute l'année 2005, le G8 sera présidé par nos amis britanniques. Tony Blair m'a assuré que la Grande-Bretagne s'emploiera, comme la France l'avait fait en 2003, à approfondir le dialogue du G8 avec l'Afrique, et qu'elle veillera à ce que les dossiers africains débouchent sur des avancées concrètes. J'ai beaucoup d'espoir dans cette présidence britannique.
Nous aurons l'occasion de réfléchir et de débattre de toutes ces questions, et de bien d'autres, lors du prochain Sommet France-Afrique, qui, comme vous le savez, doit se tenir à la fin de l'année à Bamako.
J'y confirmerai ma détermination à saisir toutes les occasions pour encourager une meilleure insertion de l'Afrique dans les circuits mondiaux : je l'ai dit maintes fois, il n'y aura pas de mondialisation réussie sans le développement de l'Afrique. C'est impossible politiquement, socialement, humainement.
C'est une année pleine d'intensité qui commence ; plus que jamais, cultivons notre dialogue singulier, soyons ardents et résolus. "Nous devons tous porter dans nos cœurs une nouvelle Afrique à bâtir".
C'est le vœu que je vous invite à partager, tous ensemble, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, Monsieur le Président, Monsieur le Doyen, et je vous dis de tout cœur, dans cet esprit, très bonne année 2005.
Je vous remercie.
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