Allocution du Président de la République à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur de sa Majesté le Roi du Cambodge.

Allocution prononcée par M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion du dîner d'État offert en l'honneur de sa Majesté le Roi NORODOM Sihamoni du Cambodge.

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Palais de l'Élysée, Paris, le lundi 20 novembre 2006




Sire,

En Vous souhaitant la plus chaleureuse et cordiale bienvenue, mon épouse et moi-même nous faisons les interprètes de toutes les Françaises et de tous les Français, honorés que vous ayez choisi la France pour votre première visite d'État.

La relation entre le Cambodge et la France, c'est cette belle et exceptionnelle amitié que célébrait, déjà, il y a tout juste un siècle, l'éclatante visite à Paris de Sa Majesté le roi Sisowath et que marquèrent par la suite tant de visites, tant d'échanges et tant de souvenirs.

C'est une appartenance commune à la Francophonie, dont Sa Majesté le Roi père fût l'initiateur aux côtés des Présidents Bourguiba, Senghor et Amani Diori. Je Vous remercie de transmettre au Roi Sihanouk, un grand ami de la France auquel m'attache des liens personnels depuis si longtemps, ainsi qu'à la Reine Monique, un message d'estime, de confiance, d'amitié et d'affection profonde.

C'est ce message que portait déjà le général de Gaulle en s'adressant, voici quarante ans, à Votre père et à son peuple réunis au Stade national de Phnom Penh. Comment ne pas citer les mots par lesquels il souligna alors nos affinités : "De part et d'autre, une histoire chargée de gloires et de douleurs, une culture et un art exemplaire, une terre féconde, aux frontières vulnérables, entourée d'ambitions étrangères et au-dessus de laquelle le péril est sans cesse suspendu".

Comment ne pas se remémorer l'appel qu'il lança pour conjurer les périls, plaider pour la paix et soutenir la volonté du Cambodge de rester en dehors du conflit qui ravageait son grand voisin.

Cet appel prémonitoire ne fût pas entendu. Entraînée malgré elle dans un conflit qui n'était pas le sien, martyrisée par d'implacables bourreaux, la nation khmère fût près de périr tout entière. De longues et tragiques années d'enfermement et de folie génocidaire pour le Cambodge. Une des pages les plus sombres pour l'histoire de l'humanité.

Permettez-moi, en ce jour, devant vous, de rendre un solennel hommage aux millions de victimes du génocide ; de former le vœu que jamais leur souvenir ne s'efface ; le vœu qu'il soit, pour toutes les générations présentes et à venir, le rappel constant des dérives implacables où peuvent mener l'illusion totalitaire et la démesure du pouvoir.

Sire,

Après le temps de la déchirure, c'est à Paris que le Cambodge retrouva la paix, la vie, l'espoir, l'unité nationale autour de son Roi par la conclusion des Accords du 23 octobre 1991.

Avec l'aide des Nations Unies, la nation khmère s'est reconstruite. La France est fière de se tenir encore et toujours à ses côtés pour l'aider à vivre dans la paix et la prospérité.

La paix repose sur l'engagement de tous à parachever l'œuvre de réconciliation nationale. Elle passe par l'instauration résolue de la démocratie, le renforcement de l'état de droit, le respect des droits de l'Homme.

Mais nous savons que les cœurs et les esprits ne pourront trouver la paix tant que les responsables du génocide n'auront pas été jugés. C'est là un impératif fondamental de justice. C'est là le devoir des Chambres extraordinaires mises en place avec l'appui de la communauté internationale.

Sire,

Pour que le peuple Khmer accède à la prospérité, Vous souhaitez renforcer l'éducation et la santé, moderniser l'agriculture, développer les infrastructures, ouvrir le Cambodge sur son environnement régional et sur le monde, mettre en valeur son incomparable potentiel touristique.

Dans cette démarche, Vous pouvez compter sur l'appui de la France. Le Cambodge est et restera en tête des priorités de notre coopération. Vous pouvez aussi compter sur le soutien de nos entreprises. Elles croient en l'avenir du Cambodge, comme en témoigne la présence parmi nous ce soir des principaux responsables économiques français.

J'encourage les Françaises et les Français à redécouvrir les incomparables beautés de Votre Royaume, notamment le site d'Angkor dont les temples, rêves de pierre et de végétation, demeurent les clés de l'âme Khmère. Avec passion et compétence, l'École française d'Extrême-Orient en a préservé l'héritage. Grâce à elle, nous continuons d'admirer l'imposante majesté d'Angkor Vat ou la statuaire énigmatique du Bayon.

Permettez-moi également de saluer l'ensemble des acteurs de notre coopération, et notamment les ONG, qui se sont engagées aux côtés du Cambodge. Leur mobilisation a transformé la vie quotidienne de milliers de Cambodgiens et des projets ambitieux ont pu voir le jour, en particulier dans le domaine de la santé avec l'Université des sciences de la santé de Pnhom Penh, l'hôpital Calmette ou l'institut Pasteur.


Je veux également exprimer ma reconnaissance au rôle irremplaçable joué par la communauté des Français d'origine cambodgienne. Nombreuse et talentueuse, elle apporte un irremplaçable souffle de dynamisme et de compréhension aux relations entre nos deux nations.

Sire,

La France sait à quel point l'unité, la paix et la prospérité du Cambodge reposent sur la haute autorité morale incarnée par son souverain.

Aussi, je lève mon verre en l'honneur de Votre Majesté et en la réussite de Son règne.

Je le lève à la santé de Leurs Majestés le Roi Père et la Reine Monique.

Je le lève à la santé de la nation khmère et à l'amitié séculaire qui unit nos deux peuples.

Vive le Cambodge !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-cambodgienne !





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