Allocution du Président de la République lors de l'installation du Haut conseil de la science et de la technologie (HCST).

Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République à l'occasion de l'installation du Haut conseil de la science et de la technologie (HCST).

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Palais de l'Elysée, Paris, le lundi 25 septembre 2006.

Monsieur le Premier ministre,
Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,

La science et la marche en avant de l'humanité sont à l'évidence même indissociables. La science est l'une des plus nobles expressions de notre liberté. C'est aussi le moteur du progrès humain. Nous sommes engagés aujourd'hui dans une compétition mondiale pour la suprématie scientifique et technologique. Notre croissance, nos emplois, notre rang dépendent de notre capacité à affronter cette compétition.

Pour la France et pour l'Europe, investir dans la science est, en vérité, une question de survie. Face aux grands pays développés, face aux géants en devenir, face aux menaces environnementales ou sanitaires, face à la fin programmée des énergies fossiles, notre avenir passe par le choix de l'intelligence, de l'imagination et de l'audace.

La science française compte vraiment dans le monde. Nous possédons une longue tradition d'excellence, qui doit toujours être améliorée et ceci, dans le respect des principes éthiques auxquels nous sommes tous profondément attachés. Notre pays dispose d'un potentiel considérable. Nous avons de grands talents : trois prix Nobel de physique dans les 15 dernières années, un en chimie en 2005, décerné à M. Yves CHAUVIN ; une école de mathématique de réputation mondiale, avec 9 médailles Fields sur les 48 décernées depuis leur création. Et je tiens à féliciter, bien sûr, très chaleureusement à nouveau M. Wendelin WERNER, qui l'a reçue cette année. Nous avons des positions de pointe, par exemple dans les technologies de l'information, dans la recherche en santé ou en physique de l'énergie : en témoigne le choix de Cadarache pour l'implantation d'Iter. Nos sciences humaines et sociales contribuent à rendre intelligible un monde qui est toujours plus complexe.

Pourtant, dans ce monde en évolution, nulle position n'est évidemment acquise. C'est pour cela que la science, la recherche et l'innovation sont des priorités nationales.

J'ai voulu que la France se donne les moyens de son ambition. Avec la loi pour la recherche, la nation consent un effort financier sans précédent depuis un quart de siècle : en 3 ans, 6 milliards d'euros de plus, 6 000 postes supplémentaires.

J'ai voulu aussi que soit remodelée, dans le respect de ses spécificités, l'architecture de notre système de recherche et d'innovation, pour plus de liberté et plus d'efficacité. De nouveaux outils ont été mis en place pour libérer la créativité des chercheurs. L'Agence nationale de la recherche aura engagé, en deux ans, 1,5 milliard d'euros supplémentaires. Ceci pour soutenir près de 3000 projets, dont un tiers dans des thématiques proposées par les chercheurs eux-mêmes. La culture de projet doit trouver désormais toute sa place dans nos laboratoires.

Depuis 2004, une vingtaine de fondations de recherche, soutenues par de très grandes entreprises, ont été créées. Elles concernent des domaines aussi divers que l'énergie, la cardiologie, l'imagerie du cerveau, l'alimentation, le spatial.

La France a investi dans de nouveaux pôles d'excellence : je pense à l'Institut national de l'énergie solaire en Savoie, à la recherche sur le cerveau avec Neurospin à Saclay, au synchrotron de 3e génération Soleil.

Nos 66 pôles de compétitivité sont opérationnels. Ils introduisent une révolution des pratiques en faisant résolument le choix du partenariat entre la recherche publique et l'entreprise. L'Agence de l'Innovation industrielle finance des premiers grands programmes, en privilégiant la dimension européenne : le moteur de recherche Quaero, le véhicule diesel hybride, le programme de bâtiment écologique ou celui de bio-raffinerie végétale.

Il fallait aussi renforcer les synergies entre les acteurs de la recherche, pour éviter la dispersion des moyens. Une dizaine de "réseaux thématiques de recherche avancée", d'une masse critique internationale, et couvrant toutes les disciplines, seront retenus dès le mois prochain. Je souhaite par ailleurs que les premiers pôles de recherche et d'enseignement supérieur soient constitués avant la fin de l'année. Ils feront mieux collaborer universités, grandes écoles et organismes de recherche.

J'ai également voulu que l'évaluation trouve toute sa place dans notre système de recherche. Une évaluation transparente, indépendante, légitime et suivie d'effet. C'est la mission de l'Agence d'évaluation qui sera mise en place dans les prochaines semaines.

Enfin, pour permettre une meilleure diffusion, dans la société, de la culture scientifique et technique, j'ai demandé au gouvernement de créer, avant la fin de l'année, un Institut des Hautes études pour la science et la technologie.

Tous ces instruments nouveaux doivent être au service d'une stratégie. La réflexion sur les grands choix scientifiques de la nation doit retrouver sa juste place, c'es-à-dire au cœur même de la décision politique.

C'est pourquoi le Haut conseil de la science et de la technologie, que je viens d'installer, est placé auprès du Président de la République. Il est composé de vingt scientifiques de très haute réputation, de très haut niveau et œuvrant dans tous les domaines de la connaissance. Je remercie son président, M. Serge FENEUILLE, ainsi que tous les membres qui le composent. La mission que vous avez acceptée Mesdames et Messieurs est essentielle : vous serez chargés d'éclairer le chef de l'État et le gouvernement sur toutes les questions relatives aux grandes orientations de la nation en matière de politique de recherche, de transfert de technologie et d'innovation. Vous ne devrez vous interdire aucune réflexion, et je vous engage fermement à vous saisir de toutes questions sur lesquelles vous jugerez urgent d'appeler l'attention des pouvoirs publics.

Votre première mission, c'est d'éclairer le contenu scientifique des grandes stratégies que notre pays met en œuvre dans des domaines prioritaires. Je pense notamment à l'énergie, à la santé et à l'environnement.

La deuxième mission que je vous confie, c'est d'apporter un éclairage scientifique sur les évolutions sociales, économiques, culturelles, en France et dans le monde. Leur compréhension est indispensable pour permettre aux responsables politiques et à l'opinion publique de mieux mesurer les enjeux des décisions qui sont prises, et de mieux comprendre les évolutions de la société, dans des situations de plus en plus complexes.

La première de ces missions relève plutôt du champ des sciences physiques, de la nature et de la vie. La deuxième tirera le meilleur profit de l'apport des sciences humaines et sociales. Mais une des raisons d'être de votre Haut Conseil, c'est aussi qu'il permettra de rapprocher ces deux grands champs de la connaissance humaine.

Enfin, au service de ces deux missions, vous devrez vous préoccuper des hommes, et des moyens. Quand je parle des hommes et des femmes, je pense à l'inquiétante crise des vocations scientifiques : il faut trouver rapidement les solutions pour y remédier. Quant aux moyens, il apparaît de plus en plus que les sciences biologiques et certaines sciences humaines et sociales auront besoin de grands équipements, en particulier d'équipements de calcul. Au-delà de la décision de réinvestir dans le calcul scientifique de haute performance, la question se pose des grands équipements à prévoir dans les années qui viennent, notamment avec nos partenaires européens. Sur cet enjeu majeur, là encore, vous devrez éclairer le Président de la République et le gouvernement.

Mesdames et Messieurs,

Vous représentez la science dans sa diversité. Votre mission est évidemment essentielle. Son enjeu, pour la France, pour l'Europe, c'est de gagner la bataille de l'intelligence. Permettez-moi de vous témoigner toute ma confiance, mon estime, et ma reconnaissance.

Je vous remercie.





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