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MESSAGE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE A L'OCCASION DU 75ème ANNIVERSAIRE DE LA FEDERATION NATIONALE DES ACCIDENTES DU TRAVAIL ET DES HANDICAPES SAINT ETIENNE LES 5 et 6 OCTOBRE 1996

Il y a 75 ans se réunissait à Saint Etienne le premier congrès de la Fédération Nationale des Mutilés du Travail.

Ainsi naissait, à l'initiative de quelques militants courageux, un mouvement décidé à faire reconnaître et à défendre les droits des accidentés du travail.

Un mouvement qui n'allait ensuite cesser d'oeuvrer pour améliorer la situation des mutilés du travail et de tous les accidentés de la vie.

Un mouvement qui, fidèle à sa devise "l'union fait la force", a tissé au fil des années un réseau irremplaçable de solidarité et d'entraide au service de tous ceux qui, éprouvés par les hasards de la naissance ou de la vie, souffrent d'un handicap.

Cet anniversaire est l'occasion de mesurer l'ampleur du chemin parcouru en 75 ans. Comment oublier en effet la situation précaire des trop nombreuses victimes d'accidents du travail au début de ce siècle ? Dans une France marquée par les épreuves de la première guerre mondiale, leur sort se heurtait au mur de l'indifférence, au point que la première mission que vos aînés se fixèrent fut de "faire sortir de l'oubli les mutilés du travail". En trois quarts de siècle, grâce à votre inlassable combat, un système de réparation et de protection efficace s'est peu à peu édifié.

Vous pouvez être fiers aujourd'hui de l'oeuvre accomplie. Votre action est indissociablement liée à l'histoire du mouvement ouvrier et aux luttes qui ont permis d'assurer à chacun des conditions de travail respectueuses de la dignité de l'homme.

Vous êtes restés fidèles à ces racines. C'est pour cela que vous avez tenu à maintenir le siège de votre mouvement à Saint-Etienne, au coeur de ce bassin industriel et minier où se menèrent les premiers combats pour la reconnaissance des droits des accidentés du travail.

Mais vous n'avez jamais limité votre action aux seuls accidentés du travail. Dès l'origine, vous avez su l'étendre à ceux qui étaient sans doute les plus fragiles, car les plus oubliés, je veux parler des handicapés de la vie, de ceux que l'on appelait les invalides civils.

Vous avez mis la force de votre réseau à leur service et leur avez fait une place à part entière au sein de votre mouvement. C'est ainsi que vous êtes devenus la Fédération Nationale des Accidentés du Travail et des Handicapés.

Et s'il fallait une preuve supplémentaire de votre ouverture, vous n'avez jamais borné vos regards à la France. Vous avez tenu à vous engager au plan international et notamment européen.

C'est pour toutes ces raisons que la FNATH, forte de ses 300 000 adhérents, constitue, pour le Gouvernement comme pour l'ensemble des pouvoirs publics, un interlocuteur vigilant et constructif.

Prévention, réparation et réinsertion constituent les trois axes indissociables d'une politique de lutte contre les risques professionnels.

Prévention, parce que l'accident du travail ou la maladie professionnelle, qui n'ont malheureusement pas disparu de notre horizon, représentent autant de drames humains et familiaux auxquels nous ne pouvons nous résigner.

La politique de prévention des accidents du travail patiemment construite depuis trois décennies avec votre concours actif porte aujourd'hui ses fruits. Le nombre d'accidents est en baisse sensible. Dans le domaine des maladies professionnelles aussi, les efforts accomplis ont permis d'améliorer la situation des salariés les plus exposés. Mais ces résultats, pour encourageants qu'ils soient, doivent être encore améliorés. Nous ne serons jamais assez exigeants en la matière.

Réparation, car la victime d'un accident du travail, touchée dans son intégrité physique et privée de sa source de revenus, doit obtenir une juste réparation du préjudice subi. Ce principe est depuis 1945 au coeur de notre système de protection sociale.

L'indemnisation des maladies professionnelles s'est également améliorée au fil des années. La refonte des tableaux de maladies professionnelles, actuellement en cours, a permis de mieux prendre en compte certaines affections, notamment celles qui sont liées à l'amiante. Le système complémentaire de reconnaissance des maladies professionnelles parachève ce dispositif. Ainsi, les salariés insuffisamment protégés jusqu'ici contre les risques professionnels seront désormais couverts.

Réinsertion, enfin, car les personnes handicapées doivent trouver toute leur place dans la vie sociale et professionnelle. C'est pour cela que le Gouvernement s'emploie à accroître le nombre de places qui leur sont offertes, tant dans le secteur protégé - il y a aujourd'hui plus de 87 000 places de CAT en France - que dans les entreprises.

L'insertion des handicapés dans un milieu de travail ordinaire constitue à mes yeux une priorité. Elle nécessite l'engagement des pouvoirs publics, à qui incombe notamment le développement de la formation professionnelle.

Elle suppose surtout l'engagement de la nation toute entière. C'est à chacun d'entre nous de répondre aux légitimes attentes des personnes handicapées. A chacun d'entre nous de prendre conscience de la richesse de leur apport à la vie sociale et professionnelle. Beaucoup reste à faire pour modifier le regard que nous portons sur le handicap. Votre action en ce sens est irremplaçable.

Ainsi, en ce jour d'anniversaire, le message que j'avais à coeur de vous adresser est un message de gratitude autant que d'encouragement.

Gratitude pour l'exemple de solidarité et de dévouement que vous nous offrez depuis 75 ans, notamment au profit de ceux qui ont payé un lourd tribu au développement économique de notre pays.

Encouragement à poursuivre, avec le soutien des pouvoirs publics, votre action pour faire de ce devoir de solidarité qui nous incombe à tous une réalité vivante au coeur de notre pays.

Jacques CHIRAC |