LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Paris, le 30 juillet 2001
La France est heureuse de saluer la commémoration solennelle du tricentenaire de la Grande paix de Montréal.
Elle se souvient de cet important traité, conclu le 4 août 1701 par son représentant, le gouverneur Louis-Hector de Callière, et par trente-neuf chefs des nations amérindiennes entourés de plus de mille délégués autochtones. Cette Conférence de la paix, qui mit fin à des affrontements cruels, fut le fruit de longues négociations qui allaient asseoir sur de nouvelles bases les relations entre Européens et Amérindiens. En créant un contexte favorable au développement de Montréal, la paix suscita l'accroissement des échanges économiques entre tous les peuples situés au sein d'un immense territoire qui allait de l'Acadie aux confins occidentaux du Lac supérieur, des sources de la rivière des Outaouais au confluent du Mississippi et du Missouri.
La France est donc fière de se rappeler les efforts entrepris il y a trois siècles en faveur de la paix dans cette partie de l'Amérique du nord appelée alors la Nouvelle-France.
Aujourd'hui, le traité du 4 août 1701 demeure singulièrement contemporain. Parce qu'il a tendu à substituer une logique de paix au cycle stérile des agressions et des représailles meurtrières, il a toujours valeur d'exemple.
L'histoire de la Nouvelle-France est à cet égard éloquente. Tant que la guerre fut le mode habituel de relations entre Français et Amérindiens, chacun resta enfermé dans ses certitudes et ses appréhensions. Mais lorsque les impasses de la guerre eurent contraint chacune des parties à composer, les protagonistes se découvrirent bien différents de ce qu'ils avaient imaginé. Ils révisèrent les préjugés qui les tenaient à distance et faisaient d'eux des ennemis. Apprenant à se connaître, ils se comprirent et nouèrent bientôt des liens de respect et d'estime. A l'ère des affrontements succéda celle des alliances, et les Amérindiens furent fidèles à la France au-delà de ce qui pouvait légitimement être attendu.
La Grande paix de Montréal mérite d'autant plus d'être célébrée que l'Organisation des Nations Unies a décidé de faire de la période 2001-2010 la "Décennie internationale de la promotion d'une culture de la non-violence et de la paix au profit des enfants du monde".
Par-delà les siècles, les ancêtres communs à la France, au Québec et aux peuples amérindiens d'aujourd'hui nous rappellent que le traité qu'ils nous ont légué reste à lire et à méditer comme un message de paix, comme un appel renouvelé au dialogue entre les peuples.
Jacques CHIRAC |