Lettre conjointe du Président de la République, du Président du Gouvernement Espagnol, M. José Maria AZNAR et du Premier ministre du Portugal, M. José Manuel DURAO BARRASSO, sur la sécurité maritime.

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE LE PRESIDENT DU GOUVERNEMENT ESPAGNOL LE PREMIER MINISTRE DU PORTUGAL

Paris, Madrid, Lisbonne, le 7 février 2003

Monsieur le Président,

L’émotion suscitée en Espagne, au Portugal et en France, alors que le pétrole échappé du "Prestige" continue à arriver sur nos côtes, demeure extrêmement vive. Elle avait conduit nos trois pays à appeler l’ensemble des Etats membres de l’Union à prendre des nouvelles mesures efficaces de renforcement de la sécurité maritime. Cette nouvelle marée noire, deux ans après celle de "l’Erika" sur les côtes bretonnes, a suscité une vague de sympathie et de solidarité dans toute l’Europe dont nous avons été heureux de retrouver la traduction dans les travaux du Conseil.

Comme vous le savez, le Conseil européen de Copenhague a décidé d’examiner à nouveau l’ensemble des questions liées à la sécurité maritime lors de sa prochaine réunion, le 21 mars 2003, sous votre Présidence et sur la base d’un rapport de la Commission. Cette échéance est à nos yeux fondamentale et doit donner lieu à des résultats concrets.

Comme le Président PRODI le confirme dans sa lettre du 17 janvier, la Commission européenne a marqué sa volonté d’aller à nouveau de l’avant, et cela sans délai, ce dont nous nous réjouissons.

Une proposition de règlement concernant la réglementation de la circulation des navires potentiellement les plus dangereux et une nouvelle accélération du calendrier d’élimination des navires à simple coque est désormais en cours d’examen dans les instances du Conseil. Nous en souhaitons l’adoption la plus rapide possible, lors du Conseil des ministres des Transports de l’Union du 27 mars 2003. Cette exigence est d’autant plus indispensable que si de telles normes avaient été en vigueur, l’accident du "Prestige" ne se serait pas produit.

Le Président de la Commission européenne confirme par ailleurs que la Commission présentera dans les tous prochains jours, conformément à la demande du Conseil européen, une proposition visant à aborder les questions, cruciales, de la responsabilité des opérateurs des transports maritimes, de la meilleure indemnisation des victimes et de la prise en compte des dommages écologiques. Elle doit également porter sur le régime des sanctions pénales pour les personnes responsables d’une pollution. Nous souhaitons que cette proposition soit soumise dans les meilleurs délais à l’examen du Conseil.

Des travaux communautaires sur le régime de responsabilité civile nous semblent également nécessaires. Nous souhaitons en outre vous informer que la France, l’Espagne et le Portugal ont décidé de co-parrainer une proposition de la Commission concernant l’adaptation des règles du FIPOL pour garantir les droits des victimes et l’établissement des responsabilités dans de tels drames.

Dans ce contexte, au cas où les plafonds du FIPOL n'étaient pas augmentés jusqu'à un milliard d'Euros lors de la prochaine conférence diplomatique de l'OMI à Londres en mai 2003, nos trois pays réaffirmeraient leur volonté d'examiner sans délai un règlement communautaire sur la création d'un fonds pour indemniser les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, en vue d'instituer ce fonds avant la fin de l'année 2003.

L’action concertée des Etats membres de l’Union devra en effet concerner également les organisations internationales concernées, comme le FIPOL et l’Organisation Maritime Internationale – pour la direction de laquelle nous avons d’ailleurs récemment confirmé notre appui à un candidat de nationalité grecque.

En ce qui concerne l’Organisation Maritime Internationale, nous souhaitons que l’ensemble des Etats membres y propose de manière concertée la création d'une nouvelle catégorie de zone maritime protégée, dont les critères de définition recouperaient les problèmes rencontrés dans les zones d’intense navigation dans l’Union et permettraient de leur donner un règlement approprié. Ce régime dérogatoire inclurait des mesures de protection. Nous souhaitons que cette demande soit formulée lors des toutes prochaines réunions des instances compétentes de l’OMI, à compter de mars 2003.

Nous comptons sur votre diligence, Monsieur le Président, pour que dans les meilleurs délais, sous votre Présidence, des décisions concrètes soient prises d'ici mars et des impulsions données en faveur de la sécurité maritime. Nous avons là une nouvelle occasion de démontrer aux citoyens européens que l’Union sait apporter les réponses que l’urgence commande.

Nous transmettons copie de cette lettre aux autres membres du Conseil européen.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de notre haute considération.

Jacques CHIRAC

José Maria AZNAR

José Manuel DURAO BARROSO

Monsieur Costas SIMITIS Premier Ministre de la Grèce Président du Conseil européen




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