"Force internationale humanitaire" : lettre du Président de la République au Secrétaire Général des Nations Unies

Lettre de M.Jacques CHIRAC, Président de la République, au Secrétaire Général des Nations Unies à propos de la création d'une « force internationale humanitaire »

Le Président de la République

Paris, le 5 janvier 2005




Monsieur le Secrétaire Général, Cher Kofi,


Le terrible cataclysme qui vient de frapper les pays de l'Océan Indien place aujourd'hui le monde devant l'exigence impérieuse d'une solidarité effective entre les plus riches et les plus démunis.

Les Nations Unies ont su réagir dans ces circonstances exceptionnelles, en se portant à la tête d'une mobilisation sans précédent de la communauté internationale. Soyez assuré du soutien total de la France aux initiatives que vous prendrez afin d'assurer la coordination - et donc l'efficacité - des efforts de tous les États et de toutes les organisations, internationales ou non-gouvernementales.

Au-delà de l'urgence humanitaire, la France et l'Union européenne ne ménageront pas leurs ressources, humaines et financières, afin de soutenir les efforts visant à lancer aussitôt que possible le processus de reconstruction des zones frappées par cette catastrophe.

Je voudrais également vous confirmer mon intention de promouvoir la création d'une « force internationale humanitaire » dont la situation actuelle illustre, une nouvelle fois, la nécessité. Dans mon esprit, il ne s'agit pas de construire une nouvelle organisation internationale dotée de moyens permanents mais d'établir un réseau international, dont l'animation reviendrait, comme il se doit, aux Nations Unies.


Cette « force » consisterait dans l'identification d'unités nationales mobilisables et projetables sans délai sur les zones de crise. Les unités, pré-identifiées dans chaque pays et composées de spécialistes de l'urgence (sécurité civile, médecins, ingénieurs, etc.), devraient disposer de moyens logistiques adaptés. Auprès du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU, serait créée une structure permanente de coordination et d'alerte. Enfin, pour permettre à tous les États de mettre à disposition des personnels, les opérations de cette force devraient être financées sur le budget de l'Organisation, traduisant ainsi un engagement équitable et sur le long terme des États. Ce sont là des propositions préliminaires, évidemment ouvertes à la discussion.

Cette force devrait pouvoir s'appuyer sur des centres régionaux. A cet égard, la France propose à ses partenaires européens un renforcement des capacités de réaction de l'Union. Ainsi, les Nations Unies pourraient-elles compter sur un pôle européen disposant de ressources préalablement identifiées et d'équipes entraînées à travailler conjointement. Je ne verrais que des avantages à ce que les formations et les exercices mis en œuvre dans le cadre de ce pôle européen soient ouverts à des personnels d'autres continents.

Je compte proposer aux partenaires de la France au sein de l'Union européenne de porter ensemble, dans le cadre des Nations Unies, cette initiative.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Secrétaire Général, l'expression de ma très haute considération.

Jacques CHIRAC