Extraits - Journée de l'Europe: rencontre de M.Jacques CHIRAC, Président de la République et de M. Tony BLAIR, Premier ministre britannique, avec des jeunes étudiants français et britanniques.

Palais de l'Elysée (Paris) - 9 mai 2004

QUESTION Quels que soient vos points de vue sur la guerre en Iraq, j'ai l'impression que c'était dans l'intérêt des deux pays d'avoir une guerre approuvée par l'ONU. Est-ce que vous pensez que l'échec dans ce domaine est dû à des différences insurmontables par rapport à l'Iraq et à nos intérêts ?

...

LE PRESIDENT - Je voudrais d'abord dire un mot à la suite de cette réflexion, parce qu'on a beaucoup parlé de cette divergence de vue au sein de l'Union européenne concernant l'Iraq, je n'y reviendrais pas. Mais cela a diffusé une image incohérente de l'Europe sur le plan de la politique étrangère et les gens se sont dit, bon, il n'y a pas de politique étrangère. Je voudrais tout de même rappeler, puisque c'est l'Europe qui est en cause entre nous aujourd'hui et dont il faut aussi parler, que l'Europe a fait des progrès considérables dans ce domaine. Aujourd'hui, l'Europe parle d'une seule voix dans toutes les grandes négociations internationales, ce qui est extrêmement important et novateur.

Deuxièmement, l'Europe a constamment des sommets où elle discute, dialogue avec ses grands partenaires, ce sont les sommets de l'Union européenne, avec la Russie, la Chine, les Etats-Unis, l'Amérique Latine et là encore, l'Europe parle d'une seule voix. L'Europe a des accords de coopération très importants où elle est également solidaire avec les pays de l'Afrique, de la Caraïbe, du Pacifique avec les pays méditerranéens, avec d'autres. Il y a donc une vraie politique étrangère européenne qui s'est petit à petit forgée et qui ne doit pas être masquée par une divergence de vues sur le seul problème iraquien, même si cette divergence de vues était forte. D'ailleurs, cette Europe a un visage, c'est M. SOLANA qui l'incarne et dans la réforme constitutionnelle, l'Europe aura un ministre des affaires étrangères commun pour assumer précisément toutes les fonctions que je viens d'évoquer. L'Europe participe en tant que telle au Quartet pour les affaires israélo-palestiniennes du Moyen-Orient et elle se prononce d'une seule voix chaque fois lorsque ces problèmes sont en cause.

Simplement pour dire que le bilan positif de l'action internationale de l'Europe ne doit pas être masqué par une divergence de vues sur un problème particulier. Alors, s'agissant de l'Iraq, je partage les sentiments de Tony BLAIR, je crois qu'aujourd'hui il est évident qu'une très grande majorité d'Iraquiens ressentent mal des forces de paix qu'ils considèrent comme des forces d'occupation. Il est donc très urgent de transférer la réalité -et ceci sans ambiguïté- de la souveraineté et des pouvoirs à une autorité authentiquement iraquienne et reconnue comme telle par le peuple iraquien.

C'est effectivement le sens des propositions de M. BRAHIMI, l'envoyé spécial des Nations Unies. Cela suppose la création d'un gouvernement de technocrates, dans le bon sens du terme naturellement, que propose M. BRAHIMI. Celui-ci pourrait mettre en place à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine des élections générales d'où sortirait un gouvernement démocratique iraquien qui devrait être réellement en charge de tous les problèmes, sans aucune ingérence particulière, y compris de la capacité de demander la fin de la mission de la force internationale, s'il l'estime nécessaire et au moment où il l'estimera nécessaire. Nous avons donc là un problème qui va être examiné à l'ONU, dans des conditions dont chacun sait qu'elles ne sont pas faciles. La France s'associera à cette réflexion, cela va de soi et le rôle de l'ONU devra, à mon sens, également être considérablement renforcé. Elle devra assumer la réalité du contrôle politique de l'ensemble de cette évolution vers un Iraq, disons ressoudé, reconstruit, grande ambition. Enfin, il faut l'espérer, c'est notre objectif. Voilà ce qui est en cause dans les semaines qui viennent, notamment au Conseil de Sécurité, comme l'a rappelé Tony BLAIR.





.
dépêches AFPD3 rss bottomD4 | Dernière version de cette page : 2004-09-21 | Ecrire au webmestre | Informations légales et éditoriales | Accessibilité