ALLOCUTION

PRONONCÉE PAR MONSIEUR JACQUES CHIRAC

PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

LORS DU DÉJEUNER OFFERT EN SON HONNEUR

PAR SON ALTESSE SÉRÉNISSIME

LE PRINCE RAINIER III DE MONACO

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Palais princier - MONACO

Vendredi 25 juillet 1997

Monseigneur,

Permettez-moi tout d’abord de Vous remercier pour Votre invitation, pour Votre accueil, pour Votre propos chaleureux et amical auquel j’ai été très sensible. Tout ceci reflétant, c’est vrai, la chaleur, l’ancienneté, l’intensité des relations entre nos deux pays.

Quand on regarde les premières photographies du Rocher, prises il y a bientôt un siècle et demi, et que l’on voit ce qu’est aujourd’hui Monaco, on mesure les extraordinaires changements intervenus en quelques générations.

Seule la presqu’île rocheuse, son Palais, ses fortifications et toute la vieille ville ont gardé leur aspect d’autrefois. Cet aspect que Vos parents et Vous-même, Monseigneur, Vous êtes attaché à préserver.

Tout le reste du Rocher, encore sauvage au siècle dernier, s’est totalement transformé. Et si Monaco est aujourd’hui cette métropole moderne, dynamique, bruissante d’activités que nous avons, tout à l’heure, survolée en hélicoptère, c’est d’abord à Vous qu’elle le doit.

Vous êtes, Monseigneur, l’héritier d’une lignée de souverains bâtisseurs parmi lesquels Votre aïeul Charles III, créateur de la Société des bains de mer ou Votre arrière-grand-père Albert Ier, passionné d’océanographie et pionnier de la protection des fonds marins. Vous-même n’avez eu de cesse d’agrandir la Principauté, de développer ses activités, de les diversifier, d’en faire un ensemble à la fois moderne et superbe.

L’ensemble de Fontvieille, avec ses bureaux d’études, ses laboratoires, ses usines, témoigne de l’audace et de la réussite de Vos projets. Je souhaite le même succès à Vos prochaines réalisations, qu’il s’agisse de la gare souterraine, qu’il s’agisse encore de la digue destinée à prolonger le Port d’Hercule.

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En cette année, la Principauté commémore le 700e anniversaire de Votre dynastie. Au XIIIe siècle, les descendants de François Grimaldi, l’ancêtre de Votre Altesse, établirent leur souveraineté sur le Rocher. Il était naturel qu’en cette circonstance, la France témoigne de la permanence et de la force des relations séculaires que vous avez rappelées, tout à l’heure, Monseigneur et qui nous unissent.

C’est que, depuis toujours, la géographie, l'histoire, les hommes, le coeur nous rapprochent.

Le XIVe siècle vit Charles Grimaldi et Philippe VI de Valois combattre côte à côte sur mer et sur terre. C’est encore un Grimaldi, Rainier II, que Charles V choisit comme chambellan et amiral. C’est Charles VIII qui, le premier, étendit à Monaco la protection et la sauvegarde de la France. Louis XIII, par le Traité de Péronne, reconnaissait solennellement la souveraineté de Vos ancêtres et renouvelait l’alliance entre nos deux pays.

Je pense aussi aux Monégasques engagés à nos côtés sur les champs de bataille de l'histoire. Je pense à Votre grand-père, le Prince Louis II qui combattit pendant la Grande Guerre avec le grade de général dans l’armée française. Je n’oublie pas les éminents services militaires que Vous-même avez accomplis pendant la seconde guerre mondiale.

L’accord du 17 juillet 1918, inscrit dans votre Constitution, a consacré l’excellence de nos relations en créant, entre la Principauté et la France, un lien d’une force exceptionnelle. Depuis, votre indépendance et votre sécurité nous sont aussi sacrées que les nôtres. Oui, Monégasques et Français ont noué dans ce siècle une coopération remarquable.

Votre amitié, Monseigneur, s’incarne bien sûr dans la présence ici, chez vous, d’une importante communauté française que vous avez évoquée à l’instant. Aux 12 500 de mes compatriotes résidant dans la Principauté, se joignent les 15 000 Français qui, chaque jour, travaillent à Monaco et contribuent ainsi au dynamisme de la Principauté comme celle-ci contribue largement au dynamisme de son environnement français.

Mais Vos succès rayonnent bien au-delà des frontières du Rocher. C’est au-delà même des communes avoisinantes, toute cette région de France, voisine de Votre Principauté, qui bénéficie de votre développement, de votre dynamisme et de votre prospérité.

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Aujourd’hui, notre relation s’inscrit également dans le cadre européen. Monaco est un partenaire à part entière de cette Union européenne qui, jour après jour, se consolide, s’approfondit et s’élargit. Déjà, et c’est un symbole fort de votre association à l’Europe, nous avons engagé des discussions pour l’introduction de l’euro dans la Principauté, vous l’avez évoquée à l’instant, Monseigneur.

Enfin, Monaco, membre de l’Organisation des Nations Unies depuis 1993, et la France doivent mener ensemble, dans les enceintes internationales, les grands combats de l’avenir : la paix, le développement, la préservation de l’environnement et notamment du milieu marin dont Vous êtes, Monseigneur, depuis longtemps, le défenseur passionné et déterminé.

Grâce à Vous, Monaco abrite un musée Océanographique et un Centre scientifique de renommée internationale. Je n’oublie pas non plus que Vous avez initié, dès 1976, l’accord franco-italo-monégasque dit Accord Ramoge pour la protection du littoral méditerranéen. L’installation à Monaco du Bureau hydrographique international a consacré Votre contribution exceptionnelle dans ce domaine.

Je me félicite, Monseigneur, du large échange de vues que nous avons eu de façon si simple, amicale, permettez-moi de dire, fraternelle tout à l’heure. Et je me réjouis que nous partagions la même volonté d’aborder ensemble l’avenir. Je me réjouis que les problèmes qui ont été évoqués auprès du ministre des Affaires étrangères par M. Lévêque soient certainement des problèmes qui doivent être résolus avec un peu de bonne volonté réciproque et un peu d’imagination et de détermination. Je me réjouis, en un mot, que nous partagions une même vision des choses et une même volonté de régler les problèmes de notre vie quotidienne.

Au cours des 700 ans écoulés depuis l’installation de Votre dynastie sur le Rocher, Monaco et la France ont forgé une amitié, une confiance, une solidarité. Au fond, Monégasques et Français ont destin lié.

Soyons encore plus ambitieux pour notre relation. Continuons, comme nous l’avons toujours fait, de développer entre nous cette coopération et cette entente exemplaires qui, dans le respect de nos accords et de nos identités, peuvent faire progresser dans le monde les causes qui nous sont chères, notamment celles que nous défendons ensemble à l’Organisation des Nations Unies.

C’est fort de cette volonté de construire avec Vous, Monseigneur, l’avenir, et confiant dans nos succès conjoints, que je vais maintenant, après Vous, lever mon verre.

Je le lève pour Vous dire les voeux que je forme pour Vous-même, pour Votre santé, pour Son Altesse sérénissime le Prince héréditaire Albert, celle des membres de Votre famille, et pour Leur avenir.

Et je le lève à la santé des hautes personnalités monégasques et françaises qui nous font l’honneur et l’amitié de leur présence. Je le lève à la prospérité et au bonheur du peuple monégasque et de tous ceux qui vivent à l’ombre du Rocher. Je bois, Monseigneur, à l’amitié, amitié sincère, profonde et sans réserve, entre Monégasques et Français.