ALLOCUTION DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
AU CONSEIL GENERAL DU FINISTERE
(Conclusion - Réunion sur l'emploi)
LORS DE SON DEPLACEMENT DANS LE FINISTERE
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Quimper, le Vendredi 31 mai 1996
Charles MIOSSEC vante toujours le dynamisme et l'imagination, la capacité d'innovation des finistériens et je n'ai pas été déçu par ce que j'ai entendu aujourd'hui de très intéressant comme réflexions ou comme témoignages.
Tout à l'heure, en entrant, deux journalistes me demandaient pourquoi j'étais venu dans le Finistère pour parler de ces problèmes. D'abord parce que naturellement ici il y a les mêmes problèmes que partout en France mais il y a de fortes spécificités : des handicaps d'abord, celui de la péninsularité, comme le dit souvent Charles MIOSSEC, comme l'a évoqué tout à l'heure le Préfet, un excellent système de formation générale puisqu'ici le taux de réussite au bac est le plus fort de France avec Paris, d'ailleurs. Une identité départementale très forte avec la volonté de vivre au pays. Une agriculture, c'est un exemple extrêmement rare, qui créé plusieurs centaines d'emplois salariés par an et qui entend bien continuer, y compris en les recrutant en milieu urbain. Bref, un département avec des caractéristiques fortes et un département qui a tout de même développé sa population pendant que la France rurale se désertifiait un peu partout et ceci grâce à une économie performante, c'est à dire à une économie animée par des hommes et des femmes de volonté et d'imagination, avec des fondations solides : l'agriculture, l'industrie, l'agro-alimentaire, la pêche, naturellement, l'industrie d'armement qui est un sujet que je suis particulièrement prêt, à raison de petites et moyennes entreprises importantes.
Tout ceci fait que ce département est assez exemplaire et je note que le plan-emploi qui avait été proposé par le gouvernement en juin dernier, a entraîné ici une mobilisation, me semble-t-il forte, des partenaires locaux et autant que je puisse apprécier, plus forte que dans la moyenne nationale.
L'ensemble des acteurs de la politique de l'emploi ont choisi de s'associer, de marier leurs initiatives. La charge départementale pour l'emploi qui engage l'Etat et le département et qu'évoquait tout à l'heure, Charles MIOSSEC a su dégager certaines priorités, le soutien, la création d'emplois dans les petites et moyennes entreprises y compris dans les très petites entreprises, ce qui est tout à fait important.
Le maintien ou l'effort pour maintenir dans le département les jeunes diplômés notamment par la nécessaire formation en alternance, pour laquelle on a c'est vrai, un retard considérable, dans notre système français et l'idée, je ne sais plus qui l'évoquait tout à l'heure, de faire des enseignants une entreprise, et sans aucun doute une idée positive, et l'accès à l'emploi des personnes en difficultés grâce à un certain nombre d'initiatives d'insertion économique qui ont été évoquées tout à l'heure est également intéressante.
On est venu ici, non pas pour donner le moindre conseil superflu mais on a évoqué en terminant deux problèmes sur lesquels je voudrais mettre l'accent : le premier c'est cette affaire d'aménagement et de réduction du temps de travail. Je voudrais dire à M. BOUE, que je prendrais volontiers sa plaquette mais je l'ai déjà. Je l'ai déjà lu, oui, et je vais même lui dire qu'elle ne m'a pas tout à fait convaincu. Même si l'idée de l'aménagement du temps de travail et de la réduction du temps de travail est à mes yeux une idée très forte, très nécessaire je crois qu'il ne faut pas non plus en faire une espèce de principe parce que tout ceci doit s'adapter aux réalités de la vie quotidienne.
C'est une nécessité. Nous sommes dans une période où tout naturellement le temps de travail diminue et où les exigences de la compétitivité font que, il faut l'aménager mais ceci ne peut pas prendre une image d'une politique générale indiscriminée, s'appliquant sur le plan des principes à tout le monde.
Pourquoi est-ce qu'il faut aménager et réduire le temps du travail ? Je crois d'abord que cela permet de renforcer la compétitivité des entreprises, très souvent ce qui d'ailleurs conduit à insister sur le fait qu'il n'y a pas deux entreprises pareilles et donc pas de règle identique qui puisse s'appliquer. Cela permet aussi, et c'est capital, d'améliorer les conditions de vie des salariés et notamment des femmes qui continuent à souffrir d'un handicap fort dans le domaine du travail, malgré les principes légaux, l'égalité des sexes. Cela permet aussi de créer des emplois. En tous les cas cela doit permettre de créer des emplois mais cette réduction du temps de travail ne peut être ni uniforme, ni imposée par l'Etat. Elle doit en réalité être négociée en fonction des spécificités dans chaque entreprise, dans chaque branche.
Les partenaires sociaux ont donné une impulsion importante aux négociations de branche et depuis quelques temps on a l'impression que cela s'essouffle. Je souhaite pour ma part, que les partenaires sociaux reprennent courage et énergie dans ce domaine et qu'une nouvelle dynamique de négociations se mette en place avec une vraie volonté d'aboutir parce que c'est nécessaire et parce que si tel n'était pas le cas cela conduirait naturellement, le législateur à reprendre l'initiative ce qui serait un échec, un échec pour les partenaires sociaux qui sont en réalité les seuls à pouvoir réellement décider, promouvoir dans ce domaine, et probablement un échec pour la technique parce que je le répète il ne revient pas aux pouvoirs publics de décréter dans ce domaine.
Je voudrais faire une seconde observation concernant l'emploi des jeunes, dont on a beaucoup parlé, surtout en première partie de dialogue. Des initiatives ont été prises depuis un certain temps par les gouvernements successifs et le gouvernement actuel continue naturellement, à essayer de favoriser l'emploi des jeunes qui sont les premières victimes avec les chômeurs de longue durée de la situation économique. Il y a eu cette réforme du financement de l'apprentissage dont j'observe qu'elle a été au total positive dans ses effets.
Il y a eu l'idée de la création de 100.000 emplois-villes sur quatre ans pour les jeunes des quartiers en difficultés. Il y a l'extension du CIE aux jeunes sans qualification dont on a pas suffisamment parlé.
Il y a le jugement tout à fait négatif porté sur l'aide à l'emploi des jeunes et que j'avais observé d'ailleurs dans d'autres départements et dans d'autres circonstances.
Ce que je souhaite c'est que les programmes régionaux pour l'emploi des jeunes se mettent rapidement en place un peu partout, non pas tant pour inventer de nouvelles mesures mais pour mettre en cohérence et coordonner l'ensemble des outils existants probablement d'ailleurs trop nombreux et dont il faudrait essayer de rendre la cohérence plus forte. C'est une mobilisation générale qui est à cet égard nécessaire. Il y a eu des objectifs qui ont été annoncés pour 1996 et qui étaient l'embauche de 250.000 jeunes représentant 50 % des recrutements. Je ne sais pas si nous y arriverons mais je crois que ce n'est pas hors de portée, en tous les cas les dernières informations statistiques dont nous disposons font apparaître que cet objectif pourrait être atteint. Si tel était le cas, ce serait un fort encouragement pour définir l'année prochaine un objectif plus ambitieux.
Je voudrais remercier encore, Monsieur le Président du Conseil Général, Mon Cher Charles, Monsieur le Préfet, Mesdames et Messieurs, toutes celles et tous ceux qui se mobilisent avec tant de compétence et d'énergie dans ce domaine et leur dire que j'ai beaucoup appris aujourd'hui et que je les remercie. |