CONFERENCE DE PRESSE
DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
A L'ISSUE DU SOMMET UNION EUROPEENNE AMERIQUE LATINE ET CARAIBES
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MADRID - ESPAGNE
VENDREDI 17 MAI 2002
LE PRESIDENT - Mesdames, Messieurs,
Ce sommet, qui vient de se tenir ici, à Madrid, et d'excellente façon, j'en remercie les autorités espagnoles et M. José Maria AZNAR, ce sommet s'inscrit dans la continuité d'une action que pour ma part j'avais fortement souhaitée il y a sept ans et dont nous avions arrêté le principe, dans un sommet franco-espagnol à Marseille, je crois que c'était en 96, en indiquant l'importance qu'il y avait à renforcer le lien entre l'Europe et l'Amérique latine et la Caraïbe.
L'objectif était de participer à la création de ce monde multipolaire dans lequel nous voyons l'avenir de la planète. Cela, naturellement, impliquait le renforcement du dialogue et nous avions lancé l'idée de ces réunions, la première ayant eu lieu à Rio et la deuxième ici aujourd'hui à Madrid.
Entre temps, naturellement, l'Europe a progressé. Nous l'avons voulu, collectivement, au sein de l'Union. Nous avons fait l'euro, nous avons fait la défense européenne commune, nous avons lancé le grand chantier de l'élargissement et celui de la réforme générale de nos institutions, dont le premier pas a été fait à Nice.
Les choses ont également évolué dans le monde. Nous avons tous pris conscience de la nécessité d'engager une action extrêmement déterminée contre le terrorisme international. Un peu partout, non seulement dans les pays en développement, dans les pays émergents, mais également dans les autres pays et en particulier en Europe, nous avons vu les inquiétudes que provoquait la mondialisation et la nécessité d'apporter dans ce domaine des réponses.
Enfin, il est apparu de plus en plus clairement que seule une volonté déterminée pour soutenir la paix et la démocratie dans le monde, pour développer le dialogue des cultures était de nature à permettre une évolution calme ou sereine d'un monde où les dangers sont grands et les difficultés considérables.
Cette réunion de Madrid s'inscrit dans ce contexte général. À Rio, vous vous en souviendrez, nous nous étions retrouvés pour marquer la volonté de rééquilibrer le triangle atlantique, pour bien marquer que les liens, de nature notamment économique, entre l'Europe et l'Amérique latine et la Caraïbe étaient dans l'ensemble au moins aussi forts que les liens entre les États-Unis et cette région. Que les liens culturels étaient évidents, linguistiques, d'origine, et qu'il y avait donc nécessité de rééquilibrer ce triangle. À Rio, nous avions pris un certain nombre de mesures concrètes. À Madrid, hier, et aujourd'hui surtout, nous avons approfondi et développé le domaine de cette coopération, notamment dans le secteur économique et commercial qui avait été absent de nos réflexions de Rio mais qui avait fait l'objet, depuis, de travaux mixtes extrêmement importants.
Cela nous a conduits à conclure aujourd'hui le processus de l'accord d'association entre l'Union européenne et le Chili, qui a été, vous le savez, signé ce matin. Cela nous a conduits à mettre en place une procédure permettant d'arriver à un accord entre le Mercosur et l'Union européenne. Cela nous a conduits à lancer une négociation pour des accords politiques et de coopération avec la Communauté andine des nations et avec l'Amérique centrale.
Nous avons également eu un certain nombre d'échanges sur les problèmes internationaux. Nous avons évoqué l'architecture financière internationale et la nécessité d'en améliorer le fonctionnement. C'était sur un rapport de la France que j'ai fait cet après-midi. Nous avons proposé d'aller plus loin pour renforcer cette architecture financière, notamment dans trois domaines : la prévention, la gestion ordonnée des crises financières et l'amélioration de la gouvernance des institutions financières internationales.
S'agissant du volet politique, nous avons décidé de renforcer notre coopération, notamment par des consultations systématiques au niveau de l'Organisation des Nations unies, entre les Européens et les représentants des pays de l'Amérique latine et de la Caraïbe. Nous avons réaffirmé collectivement notre volonté déterminée de lutter et de mettre tout en oeuvre pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes. Et, enfin, nous avons décidé de poursuivre et d'intensifier notre action commune pour lutter contre le trafic, contre la production et le trafic de la drogue et des stupéfiants.
Enfin, sur le plan culturel et social, qui est en quelque sorte le troisième pilier de notre coopération, nous avons réaffirmé la nécessité de préserver la diversité culturelle et nous avons prévu un certain nombre de réunions thématiques sur le plan culturel, universitaire, dans le domaine de la recherche, dans celui naturellement de l'environnement.
Voilà l'objet et le bilan de ce sommet. L'Europe et l'Amérique latine sont deux grands pôles du monde de demain qui s'organise. À Rio, l'Europe et l'Amérique latine s'étaient en quelque sorte donné la main, ce qui n'avait pas été le cas pendant de très, très longues décades. À Madrid, elles ont montré qu'elles étaient bien déterminées à cheminer ensemble.
Voilà pour ce qui concerne la réunion d'aujourd'hui.
Vous avez demandé la parole, Madame, je vous la donne.
QUESTION - Je suis colombienne. Vous venez de parler de la coopération internationale contre le terrorisme et je dois dire que la Colombie, à l'heure actuelle, est quelque peu inquiète du fait que, lors de l'une des dernières réunions de la Commission européenne, la France n'a pas jugé bon de mettre sur la liste des pays terroristes, ou des groupes terroristes, les FARC et l'ELN. Alors, j'aimerais beaucoup savoir quels sont les arguments qui ont poussé la France à agir ainsi et j'aimerais savoir si, après ce sommet, le gouvernement français et vous-même, Monsieur le Président, avez changé d'avis.
LE PRESIDENT - Chère Madame, vous avez une information fausse. Je ne sais pas d'où vous la tenez mais il est inexact que la France se soit opposée à l'inscription des FARC sur la liste des organisations terroristes. Je crois savoir qu'un pays l'a fait, mais pas la France.
La France est tout à fait déterminée à renforcer dans tous les domaines la lutte contre le terrorisme. Elle a eu un rôle non négligeable dans les tentatives pour essayer de régler les problèmes qui existent en Colombie, pays ami de la France, et avec lequel nous avons des relations constantes, cordiales et franches. Nous avons été victimes, récemment encore. Un Français vient d'être pris par les FARC. Nous avons été très impressionnés, très émus, par le kidnapping de Mme BETANCOURT qui, vous le savez, a des liens très étroits avec la France. Je suis moi-même intervenu auprès de tous les Chefs d'État qui pouvaient avoir une influence dans ce domaine pour obtenir sa libération. Jusqu'ici, je dois le reconnaître, sans succès. Mais je poursuivrai cette action avec la même détermination.
Donc, je ne voudrais pas qu'il y ait d'ambiguïté : l'information qu'on vous a donnée n'est pas exacte.
QUESTION - Monsieur le Président, c'est votre première sortie européenne depuis votre réélection. Au dernier sommet de Barcelone, vous étiez avec le Premier ministre, M. JOSPIN. Aujourd'hui, vous êtes seul. Est-ce que vous êtes partisan de la chaise unique ?
LE PRESIDENT - Vous n'attendrez pas de moi, ici à Madrid, des commentaires d'organisation de politique intérieure française. Je vous dirai simplement que, de toute façon, ici, j'aurais été seul, quel que soit le Premier ministre, parce que c'est un sommet auquel les Premiers ministres, ou le Premier ministre, n'assistent pas, comme à Rio, par exemple. J'étais seul.
Ceci étant, je suis tout à fait déterminé à poursuivre, mais surtout à amplifier, parce que les choses changent, une action ambitieuse, au service de la France, à l'égard de l'ensemble des problèmes auxquels elle peut être confrontée dans le monde, qu'il s'agisse de la défense de ses intérêts ou qu'il s'agisse de la défense de ses valeurs.
QUESTION - Je voudrais savoir tout simplement votre opinion à propos de la mesure protectionniste que vient de mettre en pratique le Président nord- américain, George BUSH, sur l'agriculture des États-Unis. Et après, je voudrais savoir si dans ce sommet on a parlé, plus ou moins, de mouvements migratoires vers l'Europe. Merci.
LE PRESIDENT - Nous avons, bien que cela n'était pas à l'ordre du jour, évoqué les mesures unilatérales qui ont été prises récemment par le gouvernement américain. D'abord dans le domaine de l'acier, du bois, et récemment dans le domaine agricole. Nous avons naturellement fortement regretté cet unilatéralisme qui est tout à fait contraire à une vision équilibrée et sereine du monde.
J'ajoute que ces mesures, que rien ne justifie par rapport à l'idée générale que les nations ont reconnue en créant l'Organisation mondiale du commerce, se traduisent par des effets qui seront négatifs surtout pour les pays émergents et les pays en développement. Autrement dit, au moment même où à Monterrey, récemment, au Mexique, on évoquait la nécessité d'humaniser la mondialisation, de renforcer la solidarité, mais aussi d'améliorer l'aide publique au développement et l'aide plus générale aux pays qui en ont besoin, ces mesures unilatérales vont exactement dans le sens contraire. Alors, cela préjuge mal de la préparation du sommet de Johannesburg. Donc nous sommes très préoccupés. Nous avons eu l'occasion de l'évoquer cet après-midi, notamment à la suite de l'intervention du Premier ministre belge, et je suis moi-même intervenu sur ce sujet.
QUESTION - Une question plutôt interne à l'Union européenne, mais pourriez-vous nous dire ce que vous pensez des idées de BLAIR et AZNAR sur la prolongation de la présidence du Conseil européen ?
LE PRESIDENT - Est-ce que vous pouvez préciser davantage votre question ? Qu'est-ce que c'est que la prolongation de la présidence ?
QUESTION - BLAIR et AZNAR proposent de nouvelles idées sur la présidence du Conseil...
LE PRESIDENT - Ah oui. Enfin, je me permets de vous indiquer, mais vous êtes certainement une spécialiste et cela n'a pas pu vous échapper, que, dans le cadre des propositions que j'ai faites, notamment à l'occasion de la campagne présidentielle en France, et en particulier dans l'un des premiers discours que j'ai faits au titre de cette campagne à Strasbourg, où j'ai tenu à indiquer ma vision de l'Europe de demain, j'avais effectivement fait une proposition pour assurer une présidence plus stable et donc plus efficace du Conseil européen. Et j'ai été heureux d'entendre tout récemment que le Premier ministre britannique avait rejoint cette idée et l'appuyait. Je ne peux que m'en réjouir. Je n'en avais pas encore parlé avec M. AZNAR, je ne sais pas s'il a également apporté son soutien à cette idée, dont je revendique la paternité !
QUESTION - Complément de cette question : AZNAR, hier ou avant-hier, a donné son appui à cette initiative, mais en ajoutant que, pour augmenter l'efficacité de la présidence du Conseil, il serait souhaitable que cette nouvelle figure du Président ne soit pas issue du Conseil elle-même, c'est-à-dire que ce ne soit pas un chef de gouvernement ou d'État en fonction. Est-ce que cela fait partie aussi de...
LE PRESIDENT - C'était également ce que j'avais proposé en indiquant que l'on pouvait aussi penser à d'anciens membres du Conseil européen, ceci de façon à utiliser, le cas échéant, leur expérience, leur connaissance des choses car c'est un domaine où l'expérience et la connaissance des choses sont très importantes. Vous voyez que nous n'aurons certainement pas de difficultés à nous mettre tous d'accord.
QUESTION - Que pensez-vous d'un nouveau gouvernement néerlandais avec l'extrême-droite ?
LE PRESIDENT - Je voudrais dire tout d'abord que les Pays-Bas sont un pays de grande tradition démocratique. Personne ne peut naturellement le contester. Alors, j'ai bien entendu pris connaissance des résultats des dernières élections. J'en ai surtout tiré une conclusion majeure : c'est la victoire du parti chrétien démocrate. C'est ça qui m'a surtout impressionné. Alors, la constitution du gouvernement aux Pays-Bas, la composition suppose une procédure assez longue. Je ne vais naturellement pas préjuger ce que sera le gouvernement des Pays-Bas mais naturellement nous serons attentifs aux orientations du futur gouvernement, comme nous le sommes avec tous nos partenaires et comme nos partenaires le sont avec nous. Cela fait partie de la gestion commune de nos valeurs européennes.
Nous voyons bien que, dans la plupart des pays européens, sous des formes qui ne sont pas les mêmes partout, s'expriment des inquiétudes fortes et qui au total sont liées, me semble-t-il, à la perception de l'avenir. On n'a pas peut-être attaché assez d'importance aux conséquences que comportaient, pour les Européens, les effets de la mondialisation, sous toutes leurs formes, et à la nécessité qu'il y a de maîtriser cette mondialisation, de l'humaniser et de l'expliquer d'une façon plus ouverte, plus démocratique. Et c'est ce qu'ont exprimé, chacun à leur façon et dans des contextes politiques ou nationaux différents, un certain nombre d'Européens depuis quelque temps. Il faut y être particulièrement attentif et j'ai indiqué à plusieurs de mes collègues chefs d'État ou de gouvernement, aujourd'hui, que nous devrions probablement, et assez rapidement, peut être à l'occasion du sommet de Séville, dans une réunion à part, entre nous, essayer d'approfondir cette question et de voir comment nous pourrions y répondre collectivement dans des conditions qui, naturellement, renforceraient les valeurs d'humanisme qui nous sont communes et qui sont celles qui servent de socle à la construction européenne : le respect de l'autre, le refus de la xénophobie, le refus du communautarisme, enfin tout ce que nous avons en commun pour construire l'Europe de demain et voir comment nous pourrions dans ce contexte mieux expliquer, mieux faire comprendre les choses et mieux entendre les questions que posent nos concitoyens dans chacun de nos pays.
QUESTION - On a assisté à un bras-de-fer Europe-États-Unis en Amérique latine et aux Caraïbes. Comment voyez-vous l'évolution de cette situation ? Quelle devrait être l'attitude de l'Europe à cet égard ?
LE PRESIDENT - Mon cher Monsieur, je voudrais surtout que l'on n'utilise pas le mot de bras-de-fer, ce n'est pas du tout pour ma part la conception que j'ai des relations internationales. Il est normal que chaque nation défende ses propres intérêts et il est important que le dialogue et la concertation permettent à chacun de comprendre ce qui est légitime, ce qui l'est moins et ce qui ne l'est pas pour les autres. Alors, il ne s'agit pas d'une compétition en Amérique latine ou dans la Caraïbe entre les États-Unis et l'Europe, il s'agit de tirer les conséquences d'une réalité, je le rappelle, qui a conduit le Premier ministre espagnol, en 1996, à lancer l'idée de ces sommets, de cette coopération. Il s'agit de tirer toutes les conséquences de tout ce qui réunit sur le plan économique, politique, culturel, linguistique, l'Europe et ces régions d'Amérique latine et de la Caraïbe. Ce n'est pas du tout en compétition avec les États-Unis mais en concertation entre tout le monde.
QUESTION - On attendait une décision sur le sort des treize Palestiniens, aujourd'hui ou dans les prochains jours. Qu'en est-il ?
LE PRESIDENT - La décision n'est pas encore définitive. Il y a eu, je crois, une réunion du Coreper aujourd'hui, elle n'est pas encore terminée. Il y aura une nouvelle réunion, je ne peux pas vous donner encore la réponse, elle n'est pas encore apportée.
QUESTION - Monsieur le Président, l'immigration est devenue un thème central dans quasiment toutes les campagnes électorales en Europe, on le sait très bien en France, mais la Hollande le sait encore plus. L'Europe étant prise dans le système Schengen, ne doit-elle pas changer toutes ses règles, aujourd'hui, pour offrir une nouvelle réponse à ce problème de l'immigration ?
LE PRESIDENT - Je ne crois pas que l'on puisse dire d'une façon aussi forte que l'immigration est au coeur des débats. Vous observerez que, si ce problème a été légitimement évoqué pendant la campagne électorale pour les élections présidentielles en France, il n'a pas eu une place très importante. On a parlé de la sécurité, on a parlé d'autres problèmes.
Deuxièmement, il est évident que nous devons avoir une politique européenne qui ne peut s'exprimer que collectivement, et donc dans le cadre de Schengen, pour maîtriser là encore l'immigration. Je ne dis pas la refuser, naturellement, je dis la maîtriser. Cela impose également que nous ayons une attitude plus déterminée, d'une part dans la lutte contre les organisations mafieuses qui sont à l'origine d'une part importante de cette immigration dans des conditions absolument inhumaines et monstrueuses et, d'autre part, qu'on tire toutes les conséquences de notre désir de maîtriser l'immigration en termes d'aide aux pays les plus pauvres.
Les gens qui quittent ces pays les plus pauvres les quittent soit pour des raisons politiques, parce qu'ils ont peur en raison des conflits qui s'y déroulent, soit pour des raisons économiques liées à la misère et à l'espoir, ou l'idée, qu'ils se font d'un monde meilleur, ailleurs. Il appartient donc à la communauté internationale d'une part de tout faire pour restaurer un climat de paix partout où il y a des conflits, généralement ethniques et toujours absurdes, et deuxièmement, surtout, d'avoir une action déterminée en matière d'aide au développement à ces pays. Et nous constatons bien que, depuis quelques années, l'aide au développement n'a cessé de diminuer.
Pour la première fois, à Gênes, on a reparlé il y a un an de ces questions. À Monterrey, on a fait semblant de prendre conscience de la nécessité de faire quelque chose et on a fait un pas positif mais un pas naturellement insuffisant. J'espère qu'à Johannesburg, on fera un pas plus important. Mais je dois dire que les décisions américaines, qui consistent à dire, à Monterrey, qu'elles vont apporter une augmentation de leur contribution à l'aide publique au développement alors que chacun sait que c'est une des plus faible du monde par rapport au produit intérieur brut et, parallèlement, à prendre les décisions que j'évoquais tout à l'heure et qui ont pour but de diminuer sensiblement les moyens des pays en développement et des pays émergents, constituent une contradiction.
Donc, si l'on veut maîtriser l'immigration, il s'agit là en réalité d'un élément global de l'humanisation de la mondialisation. Cela veut dire en clair qu'il n'y a pas de mondialisation de l'économie sans mondialisation de la solidarité. Cela veut dire qu'il faut une plus grande solidarité, donc aider les pays. Les gens qui quittent ces pays ne le font pas comme cela, ils le font à regret. On quitte toujours sa terre à regret. Eh bien, il faut faire en sorte qu'ils puissent rester normalement chez eux.
QUESTION - Je veux savoir quelles sont les perspectives réelles d'un accord de l'Europe avec l'Amérique centrale, d'un accord commercial, un accord d'association que vous avez annoncé aujourd'hui ?
LE PRESIDENT - Il est dans la nature des choses et dans la volonté des dirigeants d'Amérique latine, et notamment d'Amérique centrale, et des dirigeants européens d'arriver à un accord. Alors, nous avons commencé avec le Chili, nous avons progressé pour le Mercosur, et nous avons décidé ici de lancer un accord, d'abord général, politique, avec d'une part la Communauté andine des nations et d'autre part l'Amérique centrale. Alors, je voudrais vous rappeler que c'est une affaire délicate et qui doit être bien réfléchie dans l'intérêt des deux parties, y compris des pays d'Amérique centrale ou de la Communauté andine.
Pourquoi ? Parce qu'un accord, cela suppose que chacun, sur le plan commercial, je parle de la partie commerciale de l'accord, fasse des concessions, même si l'Europe a vocation à faire des concessions plus importantes. Mais chacun doit faire des concessions en matière commerciale. Or la plupart des pays de la Communauté andine et de l'Amérique centrale bénéficient aujourd'hui du système SPG drogue, et donc ils n'ont pas de concession à faire. Et donc, si l'on engageait trop vite une négociation de cette nature, ils commenceraient par y perdre. Donc il faut engager, l'objectif est clair, il faut prendre les bons moyens pour atteindre cet objectif d'association à terme, et je crois que c'est tout le sens de la décision qui, après une longue préparation, a été retenue aujourd'hui par le sommet pour ce qui concerne les pays d'Amérique centrale sur lesquels vous m'interrogez, mais aussi pour les pays de la Communauté andine. Peut-être une dernière question ?
QUESTION - Plusieurs États membres ont pris position depuis le Conseil européen de Barcelone en faveur d'un strict respect des engagements budgétaires pris à cette occasion. Est-ce que la France a changé de position à ce sujet depuis le Conseil de Barcelone ?
LE PRESIDENT - Vous savez, la France respectera naturellement ses engagements au titre du pacte de stabilité et de croissance. Qui pourrait imaginer le contraire ? C'est une polémique sans fondement. J'en ai d'ailleurs parlé aujourd'hui, parce que j'ai eu l'occasion de le rencontrer, avec M. Wim DUISENBERG.
La France est notamment attachée à la réduction des déficits publics et à l'objectif du retour à l'équilibre des finances à moyen terme. Chacun comprend que cela dépend naturellement de la situation économique. Cela dépend aussi de l'état des finances publiques et il est normal qu'un gouvernement qui prend ses fonctions veuille savoir quelle est la vraie situation dans ce domaine. Et c'est pourquoi le gouvernement actuel vient de décider de faire un audit dont il aura les résultats, d'après ce que je comprends, d'ici un mois et demi ou deux mois. À partir de là, il sera éclairé pour prendre les décisions qui s'imposent dans ce domaine comme dans les autres.
La France s'attachera naturellement à réaliser l'équilibre dans les délais les plus rapides par une politique de maîtrise des finances publiques, bien entendu, par une politique de croissance et de compétitivité. Et la politique de croissance et de compétitivité, n'oublions pas naturellement qu'elle passe aussi par la réduction des impôts et des charges qui aujourd'hui paralysent notre appareil de production. N'oublions pas que la France se situe parmi les pays en Europe où les impôts et les charges sont les plus élevées, ce qui pose évidemment un problème de compétitivité et un problème de développement économique. Voilà ce que je pouvais vous préciser.
Je vous remercie. |