ALLOCUTION PRONONCÉE PAR

MONSIEUR JACQUES CHIRAC PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

À L'OCCASION DE LA REMISE DE DÉCORATIONS À L'ÉQUIPE DE FRANCE DE HANDBALL

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PALAIS DE L'ÉLYSÉE JEUDI 15 MARS 2001

Messieurs les champions, Madame la Ministre, Messieurs les Champions du monde, Mesdames, Messieurs,

Bienvenue à tous dans ce Palais de l'Élysée où je suis heureux de vous accueillir pour une circonstance exceptionnelle.

Cette cérémonie me rappelle une autre rencontre : c'était il y a six ans, le 26 mai 1995, et les premiers invités que j'ai reçus à la Présidence de la République étaient précisément les nouveaux Champions du monde de handball qui venaient de conquérir en Islande le premier titre remporté par la France en sport collectif.

Vous comprendrez donc combien je suis heureux et aussi fier d'accueillir de nouveau une équipe de France triomphante, et une équipe de France qui a gagné au terme d'une folle quinzaine commencée à Nantes, poursuivie à Albertville, couronnée dans la capitale : neuf victoires consécutives pour que les Bleus entrent définitivement dans l'histoire avec un double titre de Champions du monde, ce que jamais aucune équipe tricolore n'avait réalisé.

Certains d'entre vous étaient à Reykjavik il y a six ans et connaissaient déjà la saveur inoubliable, j'imagine, pour un sportif de ces moments. Le goût de la victoire, leurs coéquipiers allaient la savourer aussi, grâce au talent d'un groupe où anciens et nouveaux sont parvenus à s'inscrire dans une véritable dynamique de succès.

Ces distinctions que vous allez recevoir aujourd'hui, les plus hautes de la République, la croix de l'Ordre national du Mérite pour ceux qui sont pour la première fois champions du monde et celle de la Légion d'honneur pour ceux qui ont conquis ce titre en Islande d'abord, puis l'ont confirmé à Paris, auront, je crois, une valeur particulière.

Pour chacun d'entre vous, ces distinctions représentent le chemin parcouru depuis plus de dix ans par l'équipe de France, un chemin que les Bleus se sont ouvert en 1992, lors de ces Jeux de Barcelone où ils ont remporté la médaille de bronze ; un chemin qu'ils ont poursuivi en 1995 au Championnat du monde ; une voie dont les Bleus s'étaient un peu écartés, passé le Mondial japonais de 1997, mais qu'ils ont su retrouver pour rebondir après Sydney en se tournant vers un nouvel objectif. Cet objectif, c'était un nouveau trophée à Paris en 2001. Vous vous êtes mobilisés et vous l'avez conquis.

À force de volonté, parce que vous aviez mûri aussi, j'imagine, vous avez renoué avec cette dynamique inscrite dans le temps et cette envie de vaincre qui permet de réaliser les grands parcours. Une alchimie, à l'évidence en tous les cas pour l'observateur extérieur, s'est créée, ou plutôt s'est reproduite. Comment cela est-il arrivé ? Il m'est difficile de l'expliquer, bien sûr, même pour ceux qui l'ont vécu de l'intérieur, cela ne doit pas être facile. Mais tous se sont retrouvés, apportant leur talent, leur diversité, leur complémentarité pour préparer et réussir ce grand rendez-vous. La magie a opéré, la cristallisation s'est faite -c'est ce que l'on voyait de l'extérieur- : vous avez formé une nouvelle équipe autour de votre entraîneur, un homme exceptionnel, s'il en est -oui, le mot n'est pas trop fort-, à qui vous vouliez offrir, certains d'entre vous me l'ont dit le soir, un cadeau exceptionnel à l'occasion de son départ. Et vous avez fait de lui, ce dimanche 4 février, à Bercy, le seul entraîneur français de sport d'équipe sacré deux fois Champion du monde. Cet exploit, Daniel Costantini l'a savouré sur le podium avec ses joueurs. Et on voit encore le geste du capitaine le conduisant sur le podium. Élégance, mais aussi fraternité. Un beau geste.

Ce professeur d'éducation physique, trois fois Champion de France de handball, dix fois sélectionné dans l'équipe de France, qui a dirigé pendant douze ans le Stade marseillais Université Club avant de prendre en main l'équipe tricolore, aura, ces quinze dernières années, porté les Bleus jusqu'au plus haut niveau du handball.

Daniel Costantini l'a fait à sa manière, avec son style, avec son tempérament, choisissant tour à tour ou tout à la fois d'entraîner ou d'accompagner son groupe, arbitre prenant du recul pour annoncer ses décisions, plaçant les meilleurs, chef d'orchestre laissant s'exprimer ses joueurs mais toujours présent, et, en grand mélomane, cédant la place aux artistes.

Et quels artistes ! Une équipe étonnante, solide, inspirée, créative, qui a fait de sa diversité son meilleur atout pour vaincre. Une équipe emmenée par son capitaine -prestigieux, s'il en est-, aux 300 sélections, qui a participé depuis plus de dix ans à toutes les campagnes, -Jackson Richardson, talentueux, imprévisible, irrésistible-. Un capitaine secondé par une bande de " costauds ", tous des complices, qu'ils soient de la métropole ou qu'ils viennent de la Guadeloupe, de la Martinique ou de La Réunion comme le benjamin de l'équipe, Daniel Narcisse. Et ce n'est pas un mince plaisir pour moi, croyez le bien, que d'avoir reçu de vos mains, en souvenir de ces folles dernières minutes de match, un maillot floqué du numéro de Patrick Cazal !

Voici la France qui gagne ! Une équipe féminine vice-Championne du monde et une équipe masculine double Championne du monde, jamais le handball français n'avait obtenu un tel couronnement : avec le football et le basket, c'est le triomphe des sports d'équipe.

Les amoureux du sport ne s'y sont pas trompés : dans chacune des neuf villes retenues pour les compétitions, les spectateurs ont réservé un grand accueil aux équipes des vingt-quatre pays participants. Toutes ont joué devant des salles pleines. Cela suppose une préparation sans faille de la part des organisateurs et je tiens à rendre hommage à cette occasion au rôle remarquablement joué par la Fédération française de handball, par ses volontaires, et naturellement rôle joué par son Président, André Amiel, sur lesquels a reposé toute cette lourde responsabilité, et qu'ils ont parfaitement assumée. Je voudrais les féliciter très chaleureusement.

Dans quelques jours, Paris va accueillir la Commission d'évaluation chargée d'analyser la candidature de Paris pour les Jeux olympiques de 2008. Je sais que Claude Bébéar, que je salue ici, et son équipe font tout pour mettre en valeur auprès de Hein Verbruggen et de ceux qui l'accompagnent les atouts que présente la candidature de notre capitale. Je suis sûr que la parfaite organisation de ce Championnat du monde, ainsi que ce superbe parcours qui a été le vôtre, Messieurs les Champions, et toutes les victoires qui les ont précédées aussi, constituent pour la France et pour nous tous un formidable encouragement devant ce nouveau défi à relever, celui des Jeux olympiques.

Mesdames, Messieurs, mes chers amis, je sais que vous visez désormais un titre olympique aux prochains Jeux d'Athènes. Je sais aussi que certains d'entre vous envisagent de défendre leurs chances aux Jeux de 2008. La perspective de le faire à Paris, quel rêve pour l'équipe de France ! Et surtout quel rêve, quel rêve aussi pour tous les Français ! Et cela c'est un rêve qui, je le sens, c'est une intuition, va se réaliser.

Nous n'oublierons pas ces grands moments de joie que vous nous avez donnés. Ce sont des instants exceptionnels. Et tous les Français, vous le savez, vous sont reconnaissants, très reconnaissants d'avoir maintenu si haut et avec tant de brio, tant d'élégance les couleurs de notre pays.

Aussi je suis très heureux, en vous adressant mes très vives et très sincères félicitations, de vous remettre les insignes de votre nouveau rang dans nos deux ordres nationaux.