LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Paris, le 6 juin 2003
Cher Maître, Chers Amis de Martinique,
C'est un moment rare et précieux, un moment de joie et d'émotion, qui nous rassemble aujourd'hui. Quelle meilleure occasion en effet qu'un si bel anniversaire pour vous dire, Cher Aimé Césaire, l'admiration, la reconnaissance et l'affection que nous vous portons. Au nom de tous les Français et de tous ceux à travers le monde qui ont le bonheur de vous lire et de vous connaître, permettez-moi de vous adresser mes voeux les plus chaleureux.
Par votre réflexion et votre action, par vos écrits et votre engagement, vous avez tracé un nouvel horizon à notre destin commun. Par votre oeuvre, vous avez lancé, avant d'autres, un appel à la dignité humaine, à l'éveil et à la responsabilité.
Au moment où la diversité et le dialogue des cultures s'imposent au monde comme une exigence et une nécessité, je tiens à saluer en vous le pionnier et le visionnaire.
Votre message, profondément humaniste, est celui de la nécessaire concorde de l'universel et du particulier. Car l'identité n'est pas contraire à l'universel : elle en est la clé, quand elle est sereine et assumée. Une identité apaisée qui fut pour vous, Cher Maître, une conquête.
C'est le sens du difficile combat que vous avez mené pour la reconnaissance et la dignité. C'est aussi le sens de votre combat pour la "Négritude", ce terme que vous employez pour la première fois avec Léopold Sédar Senghor et qui, parce qu'il rencontre une vérité, vivra de sa propre vie. C'est également le sens de votre action déterminée en faveur de la francophonie, cette communauté de langue qui transcende les différences dans l'expression d'une vision commune et de valeurs partagées.
La France et la Martinique ont une longue histoire faite de ténèbres et de lumières. Votre voix, tout au long du siècle, s'efforça de lever les ombres. Elle y est parvenue au-delà des espérances. Votre oeuvre constitue aujourd'hui une part majeure de notre patrimoine commun. Elle est un bien précieux de l'humanité toute entière.
Le chemin parcouru depuis les temps de "Tropiques" ou "Cahier d'un retour au pays natal" est immense. Comme toute oeuvre humaine, elle est riche de réussites, de succès, d'expériences, de certitudes et parfois de doutes. Assurément, votre personne, votre pensée et votre création sont pour nous tous, Français de Martinique et de métropole, une référence, un réconfort et un soutien.
Pour tout cela, Cher Maître, en ce jour d'exception, je veux vous remercier. Avec ma bien cordiale estime et mon amitié,
Jacques CHIRAC
Monsieur Aimé CESAIRE
(mention manuscrite). |