ALLOCUTION PRONONCEE PAR M. JACQUES CHIRAC
PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
A L'OCCASION DU DINER D'ETAT OFFERT EN L'HONNEUR
DE SA MAJESTE HAJI HASSANAL BOLKIAH,
SULTAN DE BRUNEI
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PALAIS DE L'ELYSEE - LUNDI 16 DECEMBRE 1996
Majesté,
Permettez-moi de vous exprimer notre joie, la mienne et celle de tous les Français, de vous accueillir aujourd'hui à Paris, à l'occasion de Votre visite d'Etat. Vous connaissez bien notre capitale où nous nous sommes déjà rencontrés. Lors de notre dernier entretien, Majesté, en marge du Sommet de l'ASEM à Bangkok, j'avais déjà pu Vous dire combien nous nous réjouissions de Vous recevoir en France.
Ce soir, Majesté, à travers Votre personne, la France est heureuse d'honorer le Brunei, l'un des plus anciens Etats d'Asie, l'héritier d'une longue et glorieuse histoire. S'il existait dès le XIIe siècle, une entité politique dans le nord de l'île de Bornéo, préfigurant le Brunei contemporain, des documents bien plus anciens, remontant au VIe et au VIIe siècles, attestent déjà de l'existence et de l'identité de Votre pays. Le Brunei constituait, au XVIe siècle, sous le règne de Votre ancêtre, le Sultan Bolkiah, une puissance commerciale prospère. Ses activités couvraient non seulement l'ensemble de Bornéo, mais s'étendaient aussi jusqu'aux Philippines actuelles. Le journal d'un compagnon de Magellan, l'Italien Pigafetta, témoigne du faste de la cour du Brunei, qui remplissait d'admiration tous les visiteurs étrangers.
C'est à Vous qu'il est revenu, Majesté, de rendre à Votre pays sa souveraineté. Depuis le 1er janvier 1984, le Brunei est membre à part entière de la communauté internationale. Qu'il me soit permis de saluer Votre action. Depuis Votre accession au trône, en 1967, à l'âge de vingt et un ans, Vous assumez la lourde charge du pouvoir. Sous Votre règne, le Sultanat de Brunei, qui a su préserver son identité au long des cinq derniers siècles, s'est transformé et s'est ouvert tout en demeurant fidèle à sa culture et à ses traditions.
Depuis l'établissement de nos relations diplomatiques en 1984, le Brunei et la France ont appris à se connaître. Nos deux pays ont tissé entre eux des liens d'une grande qualité que Votre visite, la première visite d'Etat effectuée par un souverain du Brunei en France, doit permettre de renforcer encore.
Une relation plus étroite et plus dense entre nos deux nations sera l'un des moteurs du nouveau partenariat euro-asiatique initié en mars dernier, lors du Sommet historique Vous le qualifiez Vous-même ainsi, de Bangkok. A cette occasion, la France a exprimé son intention d'être plus présente en Asie, et notamment en Asie du Sud-Est. Une région qui connaît, depuis plusieurs années, un formidable essor économique. Une région où prévaut désormais la volonté, commune à l'ensemble des Etats, de mettre en place des mécanismes de prévention des conflits.
Je pense bien sûr au Forum régional de l'ASEAN dont les travaux contribuent à consolider et à renforcer la paix et la stabilité dans une partie du monde où les tensions demeurent, qu'il s'agisse de la péninsule coréenne, du détroit de Taïwan ou de la mer de Chine du Sud.
La France, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies, et qui exerce, dans le domaine de la paix, des responsabilités à l'échelle du monde, souhaite, Vous le savez, être associée, à titre national, aux travaux de l'ASEAN. Votre gouvernement, Majesté, soutient notre candidature et je tiens à Vous dire combien la France y est sensible.
La France est aussi très attentive aux initiatives économiques dans la région. Notamment à la mise en place de la zone de libre-échange de l'ASEAN (AFTA) qui devrait aboutir très bientôt en 2003.
Elle porte également le plus grand intérêt au renforcement du pôle de croissance régional qui réunit, avec le Brunei, la Malaisie, l'Indonésie et les Philippines, un ensemble cohérent et actif. Votre pays y joue un rôle essentiel. Votre ambition, Majesté, est de faire du Sultanat un centre régional de services pour le commerce et pour le tourisme.
Ainsi, au moment même où la France renforce ses liens avec l'Asie, le Brunei cherche à diversifier son économie et à accroître ses échanges avec de nouveaux partenaires. C'est pourquoi, nos deux pays doivent davantage se tourner l'un vers l'autre.
Déjà, des entreprises françaises, grandes et moyennes, sont présentes dans Votre pays, dans les secteurs les plus divers comme ceux du pétrole, du gaz, de l'aéronautique, de la banque. En matière de défense, j'ai plaisir à le rappeler, Votre choix, Majesté, s'est porté, à plusieurs reprises, sur des matériels français.
Depuis les mesures prises par Votre gouvernement pour mener à bien le processus de diversification économique, le Brunei offre de nouvelles perspectives à nos hommes d'affaires. Je sais qu'ils répondront présents. Les entreprises françaises, dont de nombreux dirigeants sont ici ce soir, sont prêtes à participer aux projets qu'entend développer le Sultanat. Et si, bien sûr, Votre Majesté le souhaite.
Enfin, la même volonté d'approfondir et de multiplier nos échanges doit nous guider en matière d'investissements et de services financiers. La France qui dispose des atouts de la croissance, qu'il s'agisse des hommes, des infrastructures, du savoir-faire, la France qui est au coeur de l'Europe et occupe le quatrième rang des puissances économiques dans le monde, la France, doit être un partenaire majeur pour le Brunei.
Majesté, laissez-moi Vous dire à nouveau la joie que nous éprouvons à Vous accueillir à Paris pour cette visite très attendue, une visite qui marquera, je l'espère, le point de départ d'une nouvelle ère de coopération entre nos deux pays. Je sais que Votre Majesté partage cette volonté de donner un élan puissant, dans tous les domaines, à nos relations.
Enfin, qu'il me soit permis de présenter à Votre Majesté les voeux très sincères de bonheur et de prospérité que je forme, en mon nom personnel et au nom du peuple français, pour Votre Majesté et pour le peuple du Brunei.
Vive l'amitié entre le Brunei et la France. |