Allocution de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, lors de la présentation des vœux du Conseil constitutionnel.
Palais de l'Elysée - Mardi 3 janvier 2006.
Monsieur le Président,Mesdames, Messieurs,
Je vous remercie des vœux que vous venez de me présenter au nom de votre Collège. J'y suis très sensible et je vous adresse, à mon tour, mes vœux sincères et les plus cordiaux de bonne et heureuse année 2006.
Monsieur le Président, je garde évidemment en mémoire les souhaits que vous avez formulés l'an dernier avec ce talent et cette force de conviction que nous vous connaissons, et qui résonneront désormais aussi sous la Coupole du Quai Conti.
Vous plaidiez en faveur de la loi, de son pouvoir, de son effectivité, au-delà de la seule déclaration d'intention. Avec cette mise en garde, vous étiez dans votre rôle de gardien vigilant de la Constitution. Je crois pouvoir dire que vous avez été entendu. Tout au long de cette année, le Gouvernement et l'ensemble des pouvoirs publics ont eu à cœur de respecter cette exigence.
Oui, la loi doit être normative et précise. Elle doit être lisible et compréhensible par l'ensemble de nos concitoyens. Vous venez très justement de le souligner, elle doit aussi être toujours l'expression de l'intérêt général.
Dans le tourbillon des choses et du temps, les Françaises et les Français ont besoin de points d'ancrage. Et singulièrement de cet élément de permanence, de stabilité, de sécurité qu'est la norme, et qui trouve son expression la plus haute dans notre Constitution, notre loi fondamentale, dont votre Conseil est le garant et le défenseur.
A l'heure où la Constitution du 4 octobre 1958 fait à nouveau l'objet de débats, je veux redire devant vous tout ce qu'elle apporté à la France.
D'abord, la stabilité qui est indispensable à l'épanouissement de la démocratie et à l'action gouvernementale.
Une remarquable adaptabilité aussi : je pense notamment à la façon dont la Constitution du 4 octobre 1958 a su accompagner les progrès de la construction européenne. A chaque étape importante de l'histoire européenne, c'est d'ailleurs votre Conseil qui a dit le droit et a guidé le contenu des projets de révision constitutionnelle destinés à permettre l'entrée en vigueur des traités européens successifs.
Ensuite, une exceptionnelle solidité institutionnelle. Notre Constitution nous a permis de surmonter les crises, d'affronter toutes les situations politiques, d'alternance ou de cohabitation. Jamais nos institutions n'ont connu la paralysie. Jamais la permanence de l'État, ni le bon fonctionnement des pouvoirs publics n'ont été menacés.
Enfin, l'équilibre des pouvoirs. Je pense au premier chef, à votre Conseil, gardien scrupuleux et légitime du respect de la Constitution, et des droits et des libertés qu'elle proclame.
La Constitution doit, bien sûr, pouvoir évoluer et cela a été le cas notamment avec l'instauration du quinquennat. Mais elle doit être affirmée et défendue. Elle est un atout majeur pour notre pays.
Je voudrais aussi revenir aujourd'hui sur votre décision du 13 octobre dernier portant notamment sur le 2e Protocole facultatif du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.
Vous avez estimé que sa ratification exigerait une révision de la Constitution.
J'ai décidé d'engager ce processus. Une telle révision, en inscrivant solennellement dans notre Constitution que la peine de mort est abolie en toutes circonstances, consacrera l'engagement de la France. Elle témoignera avec force de notre attachement aux valeurs de la dignité humaine.
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Cette cérémonie des vœux, ce rendez-vous traditionnel de notre vie républicaine, est l'occasion pour le Président de la République, de vous rendre hommage. Votre vigilance, la sagesse et la clarté de vos décisions sont garants de la pérennité mais aussi de l'équilibre de nos institutions.
Je vous remercie.
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