DÉCLARATIONS À LA PRESSE
DE MONSIEUR JACQUES CHIRAC PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
ET DE MONSIEUR ABDOULAYE WADE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL
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PALAIS DE L'ÉLYSÉE
29 JANVIER 2002
LE PRÉSIDENT - Je voudrais dire combien j'ai été heureux aujourd'hui d'accueillir le Président de la République du Sénégal, mon ami Abdoulaye WADE, venu à Paris à l'occasion de l'hommage rendu à Léopold Sédar SENGHOR et aussi pour parler avec moi de la réunion que nous aurons le 8 février prochain avec un certain nombre de chefs d'État africains pour la mise en oeuvre de ce nouveau partenariat entre l'Afrique et la communauté internationale, qui est le plan que l'on appelle le NEPAD et dont le Président WADE a été l'un des principaux inspirateurs, animateurs et responsables, et qui doit aboutir, nous l'espérons, à la réunion du G8 dans quelques mois au Canada, à une vraie initiative pour le développement économique, social de l'Afrique.
Alors, nous avons longuement évoqué ces problèmes. Nous sommes tout à fait sur la même ligne, le Président WADE vous le dira avec plus de compétence que moi. Et le moment est bien venu pour la communauté internationale de tendre une main amicale et fraternelle, et respectueuse de ses traditions, à l'Afrique, qui ne peut pas faire face sans la mise en oeuvre de la solidarité internationale aux problèmes économiques, sociaux et sanitaires qu'elle doit régler. Et c'est ensemble, dans un esprit de respect mutuel, dans un esprit de dynamique et de solidarité, que nous voulons mettre en oeuvre ce nouveau partenariat.
Voilà l'essentiel de nos travaux avec le Président Abdoulaye WADE.
LE PRÉSIDENT WADE - Je voudrais dire que je me réjouis de me retrouver aujourd'hui avec mon ami Jacques CHIRAC, qui m'avait invité à déjeuner. J'étais venu pour une séance de l'Académie française qui rend un dernier hommage à Léopold Sédar SENGHOR, qui fut membre de cette Académie et qui a été l'origine de la Francophonie.
Le Président CHIRAC m'a donc donné l'occasion d'évoquer la coopération bilatérale ainsi que la coopération entre l'Afrique et les pays développés. Sur le premier point, la disparition de SENGHOR, je voudrais simplement dire que j'ai été en contact permanent avec le Président CHIRAC depuis le décès de SENGHOR.
S'agissant de la coopération bilatérale, il n'y a pas de problème. RAS, comme on dit dans l'armée, cela va très bien. La France reste toujours le pays qui apporte le plus au Sénégal. Si je dis cela va très bien, c'est certainement parce que nous, nous utilisons très bien, peut-être mieux, l'aide de la France et aussi parce que nous nous efforçons de bien gérer, puisque les institutions financières internationales comme le FMI considèrent que la gestion sénégalaise, la nouvelle gestion sénégalaise est modèle de gestion économique puisque tous les équilibres macro-économiques sont respectés. La transparence est parfaite dans toutes les opérations que nous avons réalisées jusqu'à présent.
Comme vous le savez, nous avons élaboré, en Afrique, le NEPAD, le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, qui est le plan de toute l'Afrique, adopté à Lusaka par les chefs d'État et qui est aussi bien perçu par nos partenaires du G8. Mais il se trouve que le Président CHIRAC a été choisi, ce n'est pas moi qui l'ai choisi, par les chefs d'État africains francophones, anglophones et de tous les pays au sommet de Lomé et au sommet de Yaoundé, comme l'avocat de l'Afrique. Au sommet France-Afrique, je l'ai dit, nous considérons dans une résolution que le Président CHIRAC est notre avocat pour expliquer nos problèmes aux pays développés. Et je peux attester qu'il accomplit bien cette tâche.
Depuis la rencontre de Gênes, nous avons quelques relations bilatérales avec le G8, avec le Premier ministre Tony BLAIR, avec l'Union européenne et le 8, ce sera à Paris. Le Président CHIRAC a invité une dizaine de chefs d'État africains, tous membres de la direction du NEPAD, pour que nous ayons encore de dernières discussions et de derniers réglages avant le sommet africain qui va se dérouler à Dakar à la mi-avril avec le secteur privé et avant le Sommet du G8 au Canada. Car tout ce que nous faisons, c'est pour qu'au Canada, au G8, nous puissions avoir un plan d'ensemble acceptable et pour les pays développés et pour l'Afrique.
QUESTION - Monsieur le Président, je voudrais simplement vous demander si ce n'est pas aujourd'hui une cérémonie de rattrapage que vous faites à l'égard du Président SENGHOR ?
LE PRÉSIDENT - Pas du tout. Vous savez, les relations que j'ai eues avec le Président SENGHOR étaient anciennes, fortes, affectueuses, de ma part très respectueuses de cette très grande personnalité. Et je n'avais pas à rattraper quoi que ce soit. Il sait que j'ai toujours été à ses côtés et que j'avais pour lui une immense admiration et beaucoup de respect.
LE PRÉSIDENT WADE - Monsieur le Président, je voudrais dire un mot. C'est que je pense que ce qui vous étonne, c'est que le Président CHIRAC m'accompagne, ici, ce qui n'est pas dans la tradition. Mais il vous a dit que je suis un des initiateurs du plan OMEGA et ensuite je suis le Président de l'Union économique et monétaire de l'Afrique de l'ouest et le Président de la CEDEAO. Je crois que tout cela cumulé, il est tout à fait normal, compte tenu de nos rapports personnels, qu'il m'accompagne ici.
Mais pour ce que vous avez dit, je voudrais dire que je sais qu'il y a eu des articles de presse et tout cela mais, pour moi, cela, c'est une affaire franco-française. Mais moi, ce qui m'importe, c'est que ce problème ait soulevé tant de passions en France et que même les journalistes français en parlent. Je crois que c'est la preuve du sentiment profond que les Français ont pour SENGHOR et le Sénégal. Et je crois que, pour l'Histoire, c'est cela qui est important, c'est ce sentiment profond qui relie le Sénégal à la France et qui relie le Président de France et le Président du Sénégal. |