Message de M. Jacques CHIRAC, Président de la République, à l'occasion de la première conférence ministérielle internationale ESTHER (Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau) - Sida, accès aux soins et ressources humaines.

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LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Paris, le 3 novembre 2006.


Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs,


Je suis particulièrement heureux d'adresser un message de bienvenue à toutes celles et à tous ceux qui sont venus des cinq continents pour assister à la 1ère Conférence ministérielle internationale ESTHER, consacrée au sida, à l'accès aux soins et aux ressources humaines. Je tiens en particulier à saluer et remercier les nombreux ministres présents.

Vous le savez, la France s'est toujours fortement engagée dans la lutte contre le sida. Alors que la plupart des pays développés s'en tenaient encore à la prévention, la France a pris l'initiative de promouvoir une prise en charge globale et un accès aux traitements pour tous. Dès 1997, j'ai souhaité, à Abidjan, que notre pays montre la voie d'une solidarité internationale. Il aurait été moralement inacceptable et contraire à la plus élémentaire des solidarités que l'accès aux moyens de prévention et aux traitements reste au Nord alors que la majorité des malades était au Sud.

La France a concrétisé ses promesses. En créant le Fonds de solidarité thérapeutique international, nous avons démontré qu'il n'y avait pas de fatalité : oui, l'accès aux traitements antirétroviraux dans les pays du Sud était possible. Depuis, la France a activement soutenu la création du Fonds Mondial, premier instrument multilatéral de financement de la prévention et du traitement du sida, de la tuberculose et du paludisme. Notre contribution s'élèvera, en 2007, à 300 millions d'euros.

L'augmentation des ressources d'aide publique au développement, si nécessaire soit-elle, ne suffira pas. C'est pourquoi la France a mis en place au 1er juillet dernier une contribution de solidarité sur les billets d'avion : l'essentiel de son produit sera affecté à UNITAID, la facilité internationale d'achat de médicaments. L'idée de ce type de financement innovant est simple, elle est aussi juste : affecter une proportion infime des immenses richesses générées par l'accélération des échanges, pour qu'à la mondialisation de l'économie réponde la mondialisation de la solidarité.

En plus de ces instruments multilatéraux, la France a également investi dans des programmes bilatéraux. Parmi ceux-ci, le plus important est bien entendu ESTHER. Cette première réunion doit être l'occasion de saluer ses progrès et de remercier celui qui en est à l'origine et préside aujourd'hui son Conseil d'administration, le docteur Bernard KOUCHNER.

Destiné à favoriser l'accès aux soins des personnes atteintes du sida dans les pays du Sud, ESTHER est un outil original, fondé sur des jumelages d'hôpitaux, ancré sur des partenariats en réseau. Chaîne de solidarité hors du commun, c'est aussi un outil de coopération innovant : il permet à des praticiens d'échanger, de partager leurs savoir-faire par-delà les frontières.

Si ESTHER a déjà démontré son efficacité, il doit se développer encore dans les années à venir. C'est pourquoi j'ai demandé au ministre de la santé et des solidarités, Xavier BERTRAND, que la participation de la France augmente de façon significative.

J'aimerais aujourd'hui insister particulièrement sur la contribution qu'ESTHER apporte au renforcement des ressources humaines en santé, question cruciale tant pour les pays du Sud que pour ceux du Nord. Le manque de ressources humaines peut non seulement compromettre gravement les actions menées pour l'accès aux traitements contre les grandes pandémies, comme le sida, la tuberculose ou le paludisme, mais aussi mettre en jeu la capacité de réponse mondiale face aux nouvelles menaces que constituent la grippe aviaire et de façon plus générale les maladies émergentes.

Cette préoccupation, le rapport annuel de l'OMS en 2006 l'a soulignée, de même que le G8 de Saint-Pétersbourg, dont les conclusions appellent également à une réflexion sur la couverture du risque sanitaire qui fera l'objet d'une conférence en France, au début de l'année 2007.

La réunion d'aujourd'hui doit contribuer à renforcer cette prise de conscience, mais aussi à promouvoir des solutions. Ces solutions existent. Elles existent : elles passent bien sûr par des initiatives multilatérales concertées, comme celle qu'a souhaitée l'OMS avec l'Alliance mondiale pour les ressources humaines en santé. Elles passent également par un changement de mentalité des grands bailleurs de fonds internationaux, qui doivent apprendre à considérer les dépenses occasionnées par les professionnels de santé dans les pays du Sud comme des investissements pour l'avenir. Elles passent surtout par une mobilisation des États du Nord : pour être à la hauteur de nos besoins actuels et surtout de nos besoins futurs, nous devons former plus de médecins, plus d'infirmières. C'est ce que la France a commencé à faire, depuis plusieurs années déjà. Nous porterons ce message avec force auprès de nos partenaires.

Mesdames et Messieurs les ministres,
Faire reculer l'épidémie de sida et améliorer les systèmes de santé : peu d'objectifs sont aussi essentiels pour l'avenir. C'est un combat pour la vie, pour la justice, pour la dignité humaine et le développement : votre présence à cette première conférence, votre soutien et vos réflexions y contribuent. Je voudrais, à nouveau, vous en remercier.



Jacques CHIRAC